Kerguelen

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Kerguelen ? Le petit point blanc au milieu de nulle part

Cet archipel du sud de l’océan Indien fut aperçu pour la première fois le 12 février 1772 par le lieutenant de vaisseau Yves-Joseph de Kerguelen de Trémarec (1734-1797). Le mauvais temps l’empêcha de débarquer, tout juste put-il charger une corvette de déposer à terre un acte de prise de possession au nom de Louis XV, ce que fit le 14 février l’enseigne  Charles-Marc Du Bois Guéhenneuc qui écrit dans ses mémoires : « J’ai fait arborer le pavillon et pris possession au nom du roy, mon maître, en faisant crier trois fois « Vive le Roy » et tirer trois décharges de mousqueterie ». Les lichens et les albatros en rigolent encore. Kerguelen, persuadé d’avoir découvert la mythique Terre australe — il faudra un jour que je consacre un billet à ce continent mythique — , baptisa sa découverte France australe. Le retour fut mouvementé, une tempête sépara les deux navires et, tandis que Kerguelen rentrait directement à Brest sans plus se préoccuper de son second, Louis de Saint-Alouarn, celui-ci l’attendit et le chercha en vain avant de se résoudre à rentrer à son tour, poursuivant les escales dans l’ordre prévu et n’atteignant l’Ile de France que le 5 septembre.

250px-Yves_de_Kerguelen Entre-temps Kerguelen avait fait à la cour une description extrêmement favorable de ces îles pourtant désertes et glaciales, qu’il prenait pour une partie avancée du continent antarctique. Il fut nommé capitaine et  chargé d’une deuxième expédition vers ces îles lointaines si prometteuses avec mission d’y installer quelques colons. On ne savait pas encore que le deuxième navire avait réapparu et que le témoignage de son second allait à l’encontre du sien. Ses mensonges ne seront connus qu’après le départ de l’expédition. Cette dernière se termine aussi mal que la première: on ne put débarquer qu’une demie journée, les colons et les scientifiques présents se rendirent vite compte de la désolation des lieux et ce fut le retour, avec une halte à Madagascar pour le moins controversée puisqu’il y aida un aventurier Hongrois, le comte Beniowski, dans sa répression violente des villageois malgaches, allant jusqu’à lui donner le matériel initialement prévu pour la colonisation de la France australe.

C’est le conseil de guerre qui attendait Kerguelen à son retour où on l’accusa de mensonges dans le but d’obtenir un financement, d’enrichissement personnel par le commerce de pacotilles, de mauvais commandement, de défaut  d’obéissance aux instructions et d’avoir embarqué une fille clandestine ( une jeune fille de quatorze ans, Louise Seguin, dont on a du mal à imaginer le voyage). Radié des cadres de la Marine, il écope de six ans de forteresse au bout desquels il sera réintégré, sera corsaire, se ralliera à la Révolution et, nommé contre-amiral, prendra sa retraite un an avant de mourir en 1797.

La preuve définitive de ses mensonges quant à la configuration et à l’intérêt de ces terres fut apportée par James Cook qui, en 1776, fit le tour de la plus grande île et reconnut qu’elle n’avait rien d’un continent. « J’aurais pu, écrivit-il, la nommer convenablement l‘île de la Désolation, mais pour ne pas ôter à M.de Kerguelen la gloire de l’avoir découverte, je l’ai appelée la terre de Kerguelen. » Cet archipel est encore quelquefois appelé de nos jours îles de la Désolation.

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(La même carte est visible en très grand format en suivant ce lien )

La toponymie particulière de ces îles fut donc dès le début partagée entre Anglais et Français : tout était neuf et vierge, il fallait donc inventer et le champ des noms possibles est si vaste … On peut aussi noter qu’au tout début de l’exploration de l’île les Allemands vinrent eux aussi à plusieurs reprises mais les trente-deux toponymes qu’ils avaient choisis ont été supprimés en 1917: Bismarck est remplacé par Joffre, Kronprinz devient Chanzy, Kayser devient Baie de la Marne, Prinz Wilhelm devient Galliéni, etc. On a cru bon aussi de traduire certains d’entre eux, au risque de se ridiculiser: Taube-Hafen, qui rappelle le fameux Taube, l’avion de reconnaissance allemand qui survole et bombarde Paris pendant la guerre, est traduit et puisque Taube signifie pigeon, cela devient Port-Pigeon.

Chionis blanc Chionis albus Snowy Sheathbill

Un chionis blanc en vol

Puis, plus tard, on s’avise qu’il n’y a pas de pigeon aux Kerguelen, et on transforme ce nom  en Port-Chionis, ce qui est demeuré aujourd’hui. Malheureusement, Taube n’était à l’origine ni un pigeon, ni l’avion allemand, mais simplement le nom du maître d’équipage de la scientifique et pacifique Gazelle, et n’avait donc rien à voir avec la guerre de 14 ! En revanche Victoria, pourtant épouse du Konprinz et Louise, fille du Kayser sont laissés sur la carte, sauvées par la consonance française de leur noms de même que Baudissin qui est pourtant l’amiral de la marine allemande!

Mais revenons aux toponymes anglais et français, de loin les plus nombreux:

Vous avez beau être marquis de Sains, baron de Laas, comte de Gueudreville, marquis de Boynes et être Secrétaire d’État à la Marine de Louis XV, vous n’avez que très peu de chance de laisser votre nom à la postérité (surtout si votre successeur s’appelle Turgot!) … sauf si on le donne à un groupe d’iles au sud des Kerguelen: les îles de Boynes constituent la terre française la plus méridionale ( depuis la perte de souveraineté complète sur la Terre Adélie consécutive au traité de 1959).

De la même manière le duc de Croÿ, militaire et géographe ayant soutenu la deuxième expédition, fut récompensé quand on donna son nom à une des îles de l’archipel.

La presqu’île Ronarc’h a été baptisée ainsi en 1922 par Rallier du Baty (dont je parle plus loin)   en l’honneur de l’Amiral Pierre Ronarc’h, commandant des fusiliers marins pendant la guerre de 1914-1918, puis chef de l’ensemble des armées navales et aériennes de l’armée du Nord.

Les Anglais ne sont pas en reste qui nomment l’île Howe en l’honneur du vicomte Lord Howe qui était à l’époque Commandant en chef des armées britanniques en Amérique du Nord.

Des noms de navigateurs ( Raymond Rallier du Baty ,1881-1978, qui fit plusieurs explorations de l’archipel et en nomma plusieurs lieux), de navires (l’île du Roland porte le nom du navire de Kerguelen lors de sa deuxième expédition), de militaires ( Galliéni, Joffre, Foch etc.) et de personnages, souvent des hommes politiques ou des scientifiques (Ampère,  Joliot-Curie, etc.), auxquels on souhaitait ( on devait ?) rendre hommage ont été utilisés.

Les Anglais ont usé (abusé ?)  de ce système. Qu’on en juge: le capitaine Nares, commandant le Challenger, séjourne dans divers secteurs des Kerguelen du 06 au 31 janvier 1874 et effectue de nombreuses observations scientifiques sous la direction de Wyville-Thomson. Il prépare la prochaine expédition du  Volage, qui devra amener la mission astronomique anglaise pour l’observation du passage de Vénus devant le Soleil. Parmi les 85 toponymes attribués à cette occasion, 22 le sont en l’honneur des membres d’une précédente expédition, celle de l’Erebus et du Terror (1840), le nom du commandant, Sir James Clark Ross, étant attribué au  sommet des Iles Kerguelen. Les 63 autres toponymes correspondent à l’ensemble des noms des membres de l’équipage du Challenger et des scientifiques, ainsi que ceux des deux bateaux venus amener et remmener les membres de la mission astronomique, le Volage et le Supply, en novembre 1874 – février 1875, sans oublier les noms des chefs de l’Amirauté britannique, Evans et Tizard. Tous ces toponymes sont encore en vigueur aujourd’hui.

Anecdotiquement, on peut  relever que James Cook avait donné le nom de Bligh’s Cap (« la casquette de Bligh» ) à un petit îlot: le capitaine Bligh, le futur commandant qui allait se rendre tristement célèbre avec l’épopée du  Bounty, était alors son second. Mais cet ilot a repris le nom que Kerguelen lui avait donné: îlot du Rendez-vous, au grand désarroi de Cook qui écrivit dans son journal : «Qu’est-ce que c’est que ce rendez-vous ? ça n’est accessible qu’à des oiseaux !»

Quelques toponymes sont dus aux baleiniers américains et anglais qui , profitant de ce que personne ne réclamait la souveraineté sur l’archipel — cas unique! —, vinrent y chasser  et en nommèrent quelques îles, criques et autres reliefs. Pour eux, pas de noms propres mais des noms purement descriptifs ( la Baie de la Baleine, l’anse du Bon Coin, etc.) ou le nom de leurs navires. La plupart ont été traduits en français sauf le Mont Lucky ou le Mont Peeper ( « qui jette un œil ») et quelques autres.

Et puis, quelquefois, quand la simple description ne suffisait plus ( l’île Longue, l’île Haute, l’îlot Solitaire, etc ) la nostalgie s’en est mêlée: le Château d’If marseillais ne s’imaginait sans doute pas avoir un jour un jumeau austral, pas plus que le golfe du Morbihan ne s’attendait à avoir son pendant aux antipodes ( ce nom lui a été attribué par Rallier du Raty en 1922, en remplacement de Royal Sound donné par Cook, mais on a conservé la Passe Royale) . Quoi de plus normal que de nommer là un glacier Chamonix, ici un mont de l’Iseran, là encore une baie Bretonne ?

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Albatros à sourcils noirs

On a aussi utilisé des noms plus anecdotiques  issus de la ressemblance du paysage avec un autre (le mont de la Pyramide Mexicaine), rappelant un évènement particulier survenu lors de l’exploration ( notamment des disparitions tragiques: Ile Guillou, Ilot M. Bedja, le Halage des Naufragés) ou rappelant une activité particulière (golfe des Baleiniers, presqu’île des Phoquiers, etc). La présence animale n’est pas oubliée ( le cañon des Sourcils-Noirs  abrite une importante colonie d’albatros à sourcils noirs) non plus que la géologie ( le ravin du Charbon ainsi nommé d’après des affleurements de lignite).
Il est remarquable que le moindre rocher dans l’eau, la moindre anfractuosité des côtes, le moindre relief ait été nommé, obligeant à créer une commission spéciale de toponymie pour mettre un peu d’ordre dans tout cela ( signalée par Siganus Sutor dans son commentaire du billet précédent qui est à l’origine de celui-ci)! Il est vrai que l’archipel est découpé de telle façon en tant d’îles et ilots, péninsules, presqu’îles, baies, anses, criques, détroits, canaux etc. qu’il fallait bien une dénomination commune et précise si les marins et les explorateurs voulaient se comprendre et s’y retrouver.

La fameuse commission a dû faire preuve de discernement et de diplomatie pour ne pas heurter la susceptibilité des uns et des autres, mais elle a su faire preuve aussi d’un peu d’imagination et d’humour. Un seul exemple: un ensemble de trois monts naturellement appelés Athos, Porthos et Aramis était traversé par une petite rivière anonyme que l’on baptisa … Milady!

Les localités — concernant les Kerguelen, on a du mal à écrire village ou même lieu-dit, puisqu’il ne s’agit quelquefois que d’un simple abri — portent des noms pour certains facilement compréhensibles comme Port-aux-Français ( qui ne date que de 1950)  ou Port-Douzième ( campement fondé par la douzième mission en 1962, en vue de la reconnaissance et du levé de la Presqu’île Ronarc’h par H. Guichard, ingénieur géographe, et J. Nougier, géologue.), mais qui pour d’autres méritent quelques explications:

Port-Couvreux doit son nom à Abel Couvreux, ingénieur qui participa au creusement des canaux de Suez et de Panama, vice-président des sultanats du Haut Oubangui et qui fut administrateur et généreux bienfaiteur de la société des îles Kerguelen créée par les frères Bossière dont je parle un peu plus bas, décédé à la fin de l’année 1912.

Port-Bizet est nommé en référence à la race de mouton Bizet du Cantal, introduite sur l’île pour la consommation locale.

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Le Bizet du Cantal …à Kerguelen

Port-Christmas : c’est ici que James Cook redécouvre les Kerguelen et  jette l’ancre le jour de Noël 1776.

Port-Jeanne d’Arc: ainsi nommé par les frères Bossière, les derniers baleiniers français qui ont obtenu le 31 juillet 1893 du gouvernement français la concession exclusive de l’archipel pour cinquante ans (oui, vous avez bien lu : concession exclusive, cinquante ans ! l’État savait être généreux en ces temps-là!). Pensant pouvoir faire fortune en exploitant l’huile de baleine, ils  feront appel au savoir-faire  et aux capitaux norvégiens. En novembre 1908, le vapeur norvégien le Jeanne-d’Arc, commandé par le capitaine Ring, arrive aux Kerguelen et fonde l’établissement qui portera le nom du bateau. Les Norvégiens l’avaient baptisé ainsi pour faire honneur aux Français, car c’était l’année même de la béatification de la future sainte nationale ! La première année de chasse, 232 baleines furent tuées mais ce chiffre ne cessant de décroître, on rajouta les éléphants de mer au tableau de chasse … Dès 1922 et l’apparition des navires-usines et après 1930 avec l’apparition des huiles de synthèse, leur affaire périclite et la station tombe en ruine. La présence éphémère des Norvégiens explique pourtant quelques toponymes comme la rivière des Norvégiens et quelques noms de fjords; elle explique aussi l’introduction des rennes sur l’archipel. La presqu’île Jeanne d’Arc, anciennement nommée Péninsule Joffre,  doit, elle, son nouveau nom au Service Hydrographique de la Marine en 1937.

Enfin, Molloy, petit poste d’observation au fond du golfe du Morbihan prend le nom de la pointe où il est situé et qui  a été baptisée ainsi, lors de l’expédition anglaise du Challenger dont je parle plus haut, en souvenir de  William Molloy, matelot sur le Terror dans l’expédition de Sir J.C. Ross, en 1840.

Plus de mille toponymes ont été donnés aux Kerguelen ( parmi lesquels 420 noms de personne !): chacun a son histoire, pour la  plupart parfaitement connue. Impossible de tous les citer!

ƒƒƒ

Les curieux peuvent  lire sur ce site un résumé de l’histoire des Kerguelen.

Une partie des informations que je vous livre ainsi que des photos qui illustrent ce billet sont issues de ce site remarquable.

La conférence de Gracie Delépine donnée le jeudi 16 décembre 1999 au Campus universitaire du Tampon à la Réunion et bien cachée sur la toile m’a été d’une aide précieuse.

29 commentaires sur “Kerguelen

  1. Très intéressant comme d’habitude. Quel dommage qu’un aussi joli nom ait été porté par un personnage aussi peu recommandable. Et où l’on voit que la toponymie peine à être une science exacte 😉

    Sur le site que vous indiquez (photo magnifique du Mont Ross vu du Golfe du Morbihan), j’ai appris qu’il y avait également le « Plateau de Kerguelen »

    Les sismologues de l’Institut allemand Alfred Wegener de recherche polaire et marine (AWI) viennent de prouver que le plateau de Kerguelen qui se situe au sud de l’océan Indien est en réalité une plaque continentale et non une partie de croûte océanique émergée comme il a longtemps été supposé.

    Le plateau de Kerguelen, haut en moyenne de 3 000 mètres, repose à une profondeur d’environ 4 000 mètres en dessous du niveau de la mer. Il s’étend sur une surface supérieure à celle de l’Allemagne et de la France réunies. A certains endroits, le plateau s’élève même au dessus du niveau de la mer, il forme notamment les îles Kerguelen dont le sommet a été mesuré à 1 850 mètres au dessus de niveau de la mer. Les scientifiques pensaient, jusqu’ici, que le plateau Kerguelen était un morceau de plaque océanique sur lequel s’était déposé du magma.

    Si Kerguelen avait voyagé il y a 20 millions d’années, c’est bien un ‘micro continent’ qu’il aurait trouvé : Ce microcontinent possédait probablement une flore et une faune de type tropical il y a 50 millions d’années. Le microcontinent se trouva définitivement englouti sous les eaux il y a environ 20 millions d’années et se trouve aujourd’hui mille à deux mille mètres sous le niveau de la mer. (wiki)

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  2. Dommage que ces îles de 7000 km2 (un peu moins que la Corse) soient pour l’instant totalement inexploitées et (presque) inhabitées ! Si je travaillais au ministère de l’outremer, je mettrai un petit groupes de personnes compétentes sur le coup pour essayer de développer ces îles et pour en faire quelque chose !

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  3. @ Zerbinette :

    Ainsi, Kerguelen n’avait géologiquement pas tort en prétendant qu’il s’agissait d’un continent austral !

    —————–

    J’espère que le commentaire « d’immobilier vacances » est une blague. Oser prétendre qu’il faudrait « faire quelque chose » d’un lieu qui n’est pas gâché par l’Homme ! Oser considérer comme un problème qu’un lieu soit « inexploité » ! Sinistre mercantilisme touristico-utilitaire :-(.

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  4. Jacques C., mon petit doigt me dit que le commentaire qui vous a valu de parler de “sinistre mercantilisme touristico-utilitaire” pourrait bien être l’œuvre d’un facétieux utopiste nommé Arcadius. En aurait-il eu le loisir sans doute aurait-il accompagné Monsieur de K/guelen dans son voyage vers la France australe.

     

    Leveto, vous avez dégoté le texte d’une conférence — La toponymie des îles Kerguelen : reflet de leur histoire et de leur géographie — ayant été donnée en 1999 au Tampon* par Gracie Delépine et qui donne un grand nombre d’indices sur la toponymie kerguélienne. On y lit entre autres ceci : “A ce sujet, si l’on considère que Jeanne d’Arc est autant un personnage historique que religieux, c’est bien là absolument le seul toponyme à caractère religieux qu’on peut trouver aux Kerguelen, – alors qu’en France, les Saint-Jean ou Saint-Martin se dénombrent par centaines… Ceci aussi est la caractéristique d’un pays neuf : pour qu’un lieu devienne sacré, il lui faut d’abord une certaine antiquité. Et il n’y a pas, -ou pas encore ?- de lieu de dévotion permanent sur les Kerguelen.” Un passage qui irait bien avec votre Dictionnaire de géographie sacrée et ecclésiastique sans doute. Toutefois, il semblerait que certaines choses aient échappé à la conférencière : aux Kerguelen on trouve un Dôme du Père Gaspard à proximité du point culminant de l’archipel. Qui était-il, ce Père-là ? Et puis nous avons les Rois Mages, trois sommets contigus qui portent, du sud-ouest au nord-est, les noms de Mont Balthazar, Mont Melchior et Mont Gaspard.

    Quant aux trois mousquetaires dont vous parlez, il est bien connu qu’ils étaient quatre, ce qui n’a pas été oublié par nos toponymistes : à l’ouest du Mont Athos — qui n’est pas en Grèce ici —on trouve un Mont d’Artagnan culminant à 865 m.
    http://www.amapof.com/ker18/Carto/carte.php

    À l’ouest de l’île principale on trouve une pointe Tromelin sans aucun doute ainsi nommée en l’honneur de cet ingénieur de la marine qui fit sa fameuse chaussée dans le Port Louis avant de secourir les esclaves naufragés sur l’île à laquelle la postérité donna son nom, mais ce qui est très-étrange c’est qu’à côté de cette pointe-là on trouve un “lac Zizi”. Un nom peut-être choisi par le chanteur Pierre Perret.

     

    * Il est loisible de se demander si au XXe siècle ou au XXIe on aurait opté pour le nom de “tampon” en baptisant un lieu nouveau.

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  5. PS — “Oser prétendre qu’il faudrait « faire quelque chose » d’un lieu qui n’est pas gâché par l’Homme !

    Au fait, Jacques C., c’est déjà trop tard pour le gâchage. Le mal est déjà fait. Chats et souris, entre autres. Lapins aussi. Mais pas Félicie — pas encore.

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  6. ►Siganus: Père Gaspard est le surnom d’un alpiniste de la première heure, de son vrai nom Pierre Gaspard
    Son nom a été donné au dôme des Kerguelen par Polian et Rens

    Explication : le « père » Gaspard, alpiniste, fit la première ascension de la Barre des Ecrins, par la face sud, en 1880. La Barre des Ecrins est un sommet du Dauphiné, pays d’origine d’un membre de l’expédition. De nombreux noms autour du Mont Ross évoquent des noms de la Barre des Ecrins : Glaciers de Bonne Pierre, de la Pilatte, Rouge, Blanc, Noir, etc.

    À lire dans le deuxième des trois sites que je cite en source de mon billet.

    Idem pour le lac Zizi:

    Nom donné par H. de Corbiac, ingénieur géographe, en 1966.
    Explication : lac couvert de glace pilée ressemblant à une préparation de liqueur pour pays chauds : une « Marie Brizard Zizi ».

    Cela dit, je ne sais pas ce qu’est une Marie brizard Zizi? Google me parle d’un Zizi Coin Coin à base de Cointreau et de Citron mais d’apparition bien plus tardive que 1966! La Marie Brizard pour pays chauds ( aux Kerguelen? ) serait-elle à base de citron? … Jamais bu de Marie Brizard, ni sous les Tropiques, ni près de l’Équateur… et même très peu sous nos latitudes, alors …

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  7. ►Jacques C
    je partage votre réprobation concernant les vues immobilières de notre ami. J’ose espérer, comme vous et Siganus le suggérez, qu’il ne s’agit que d’une bonne blague!
    La solution se trouve peut-être du côté de l’archipel brésilien des Abrolhos au large de Bahia, parc naturel depuis 1983. Il est interdit d’y débarquer sur les cinq îles qui le composent ; seul un contingent de touristes trié sur le volet ( et, bien sûr, financièrement …) peut aller y observer les baleines (avis aux amateurs: encore plus écolo compatible qu’en Argentine et Chili réunis!). Un unique habitant, gardien du phare et des lieux, un militaire détaché par la Marine, vit avec sa famille sur l’île de Santa Barbara.

    L’auteur de la photo pointée par le lien est :Butterfly voyages – Serge Ouachée

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  8. sur le site indiqué par leveto, j’ai découvert le mot « gorfou »(La Presqu’île Ronarc’h en hiver, vue depuis Port-aux-Français. )et cherché sur wiki (merci leveto)
    voici le gorfou doré :

    « 

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  9. Leveto, il semble peu probable que la personne à l’origine du message du 9 mai 2012 à 21:53 ait eu en tête ces îles brésiliennes. Après tout, n’a-t-il pas donné la bonne superficie des Kerguelen ?

    Ҝ

    Un seul Père pour tout un archipel, et il n’est même pas fichu d’être prêtre ?

    Quant au zizi qui ne serait que de la glace pilée, cela me semble être une explication concoctée après coup, pour justifier a posteriori ses mauvais tours de petit garçon aimant dire des gros mots.

    Ҝ

    Vous n’avez rien dit sur le nom de Kerguelen lui-même. On peut supposer que les trois premières lettres — qui servent en général à désigner l’archipel par les “Kergueléniens” eux-mêmes — forment le préfixe breton signifiant “hameau, village”. Dans ce cas Dieu seul sait ce que pourrait signifier “Guelen”.

    Une chose vaut sans doute la peine d’être mentionné à ce sujet : ce préfixe breton “ker” a — ou avait — pour habitude d’être abrégé à l’aide d’un “K barré”, qui ne peut être reproduit à l’aide d’une manip normale sur un clavier d’ordinateur normal. Ce qui fait que la plupart du temps les toponymes ou les patronymes bretons commençant par “Ker…” (oral) donnent “K/…” (écrit), à moins bien sûr de les écrire dans leur intégralité, comme il a été fait ici à propos de Kerguelen. Il est possible que cette habitude ait disparu en Bretagne même, notamment suite aux directives de l’administration française pour qui ce “K bizarre” était source d’erreurs typographiques. Elle s’est toutefois maintenue dans d’anciennes possessions françaises. Par exemple dans cet “archipel” situé à 3 000 km au nord des Kerguelen, à savoir les Mascareignes.

    À Maurice comme à la Réunion les patronymes commençant par “Ker” sont souvent écrits “K/”, ou “K’”. Nous avons par exemple la femme de lettre mauricienne Raymonde de Kervern, qui ici signe “K/Vern”. Dans le Dictionnaire de biographie mauricienne (1941-1993), on retrouve un François Georges Victor K/Vern qui fut maire de Port-Louis dans les années 1880, ainsi qu’un Jean Joseph Daniel de K/Jean, mort à Rivière du Rempart en 1793. Dans l’Histoire des domaines sucriers de l’île Maurice (1964-1979), il est fait mention d’un Jean Marie de K/Mellec, bâtisseur de sucrerie dans le Sud. Quant à la Réunion, on y trouve des K/Bidy, des K/Véguen, des Kerourio ou K’ourio, etc. (Entre parenthèses, il ne me semble pas impossible que certains à la Réunion prononcent “kabidi” le nom Kerbidie écrit “K/Bidy” ou “K’Bidy”. À confirmer par un Réunionnais. Sur le web on trouve aussi la trace d’une famille “K/Varec” qui aurait fini par devenir “Cavarec”.)

    Tout ceci fait que le nom de nos îles et de leur découvreur éponyme aurait sans doute pu s’écrire “K/Guelen”.

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  10. ►Rose; je suis content pour vous que vous ayez pu retrouver ce blog auquel vous semblez tant tenir!
    Pensez à faire une sauvegarde personnelle de vos contributions et de vos échanges avec ce blogueur : vous serez sûre de ne pas tout perdre !
    Et peut-être nous ferez-vous part de l’adresse de ce blog qui titille ma curiosité?

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  11. Leveto, ouh ! ouh ! Encore un commentaire tombé dans une crevasse de la calotte de Cook…

    (À ce sujet, on trouve sur cette calotte glaciaire un nom qui est peut-être relativement rare en toponymie française : “nunatak”. En effet, sur la carte de l’IGN on voit un “Nunatak Lacroix”, un “Nunatak Mercanton” et un “Nunatak de Lapparent”. Nunataq, un mot d’origine inuit rendu dans l’océan Indien : de quoi perdre un peu le Nord.)

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  12. >leveto
    c’est une femme ; elle m’a répondu ce soir ; je croyais que c’était un homme que je connaissais par ailleurs, non.

    Je ne sauvegarde jamais rien.
    éruption volcanique, je reviendrai. Boulot, trop, et déplacement privé important.

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  13. pour information, en marge d’une grande nuit et une belle soirée et d’une exposition au museum de Grenoble : Dossiers documentaires des expositions Ahglagla !? Questions de climats

    AHGLAGLA !? CHANGEMENTS CLIMATIQUES EN QUESTION
    Installation temporaire
    1er février – 1er juillet 2012
    Salle Montagne vivante

    Dans le cadre de l’exposition « Ahglagla !? », la bibliothèque vous propose d’approfondir le sujet à travers une sélection d’ouvrages et d’articles disponibles à la consultation :
    une page de bibliographie :
    http://moliere.grenoble.fr/modules/webportal/results.php?op=filter&idresult=1233389&idbase=2&fields=Mots-cles&add_filter=P%F4le%20Sud
    avec par exemple :
    L’Antarctique, terre promise des paléontologues
    Pour la science , N° 415, mai 2012, p. 42-48
    Cote : P 197

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  14. un peu, beaucoup, hors sujet mais qui sait ?
    un nouveau dictionnaire pour leveto :
    « Que seront les mots du futur ? Nul ne le sait, mais Anne-Caroline Paucot, néologiste amoureuse des mots nouveaux, tente d’imaginer les mots de demain dans son Dico du futur (www.dicodufutur.org). C’est un travail d’imagination prospectiviste très plaisant et stimulant. Qui sait si à l’avenir on n’utilisera pas le mot « toitager » pour désigner un potager sur le toit, ou la « zombiquité » (capacité d’être présent physiquement et absent mentalement car en contact avec d’autres personnes via son portable). Il n’est pas impossible que bientôt l’on utilise une expression nouvelle pour dire que l’on prend son repas devant son ordinateur : « Mettre des petits plats dans l’écran ».
    http://www.scienceshumaines.com/neologie-comment-se-creent-les-nouveaux-mots_fr_28754.html

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  15. ► Siganus:
    L’interdiction du K/ en français émane du Ministre de la Marine et des Colonies à destination des Autorités Maritimes en date du 19 avril 1881:

    « Interdiction du K/, pour l’orthographe des noms propres dans la correspondance officielle »
    […] Ce mode de procéder pouvant entraîner une confusion et rendre plus difficiles les recherches dans les répertoires, tables alphabétiques, archives, … J’ai décidé qu’il ne serait plus fait usage du K/ dans aucune correspondance officielle, matricules, livrets, documents périodiques etc […]

    Le Ministre de la Marine et des Colonies
    Cloué. (Bulletin Officiel de la Marine 1880-1883 Tome 13)
    Le Conseil d’État aurait suivi et pris une ordonnance dans ce sens en 1895.
    ►Iado: drôle d’idée que ce dictionnaire!

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  16. Interdiction et ordonance qui n’ont manifestement pas été suivies à la Réunion (cf. exemples ci-dessus). En ce qui concerne Maurice, c’était déjà trop tard. Il est étonnant, quand même, que ce soit le Ministre de la Marine et des Colonies (à destination des Autorités Maritimes) qui ait été à l’origine de cette interdiction. On serait en droit de penser que la chose concernait au premier chef les Bretons de Bretagne, et l’état civil de la France métropolitaine.

    Je me demande si, en son temps, le nom de Monsieur de Kerguelen s’est écrit « K/guelen » ou « K’guelen »…

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  17. ►Siganus
    quelques rapides recherches m’ont permis de voir écrit le nom sous la forme K/Guelen sur des actes de mariage
    «Tangui K/guelen escuier sieur de penanjun a esté marie deux fois premierement
    avecq dam.lle marie de la roche … et en seconde noyce avecq dam.lle marg.te de
    tregoet
    seconde fille d escuier Jean de tregoet et de dam.lle rennée moisan sieur et
    dame de Liscuit
    et de pargamou, … » (source : BnF pièces originales 1606 fo8).»

    Ailleurs ( in Kerguelen, le phénix des mers australes, Alain Boulaire, 1997)
    « Suivent les signatures de « Françoise Marie Millon, Joseph de K/guelen ; Gui Marie de K/guelen, sgr du Car- pont, P. Pennarun, prestre et curé. » Les Kerguelen signent, selon l’habitude, en usant, en lieu et place de Ker, du fameux K barré …»

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  18. Idem pour le lac Zizi: Nom donné par H. de Corbiac, ingénieur géographe, en 1966.—leveto | le 12 mai 2012 à 20:53

    – cf. les tribulations du nouveau PM au sujet de son nom dans les medias …..de l’étranger.

    – Pour les plantations sur le toit (iado, ci-dessus)on n’oubliera pas les jardins suspendus,il y a quelques milliers d’années, hé ?

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  19. L’Amer, ça ne vous tenterait pas de changer d’île ? Celles-ci manquent peut-être de ruines antiques, mais vous aurez le meilleur air du monde ! — auquel s’ajouterait la compagnie de quelques phoques lézardant sur des plages vierges et celle d’albatros prompts à froncer leurs sourcils noirs. Et puis elles abritent des (espèces) de chèvres ! Vous ne devriez donc pas être complètement dépaysé.

    Leveto, c’est noté pour les Kerguelen, les gens, dont le nom a donc bien été écrit “K/guelen”. Merci d’avoir pris le temps de le chercher. Je suppose que cet autre navigateur fort en gueule, Olivier de K/sauzon, doit être du même tonneau (de K/ozène). Il semblerait toutefois que le “Sauzon” en question signifie “Saxon”. Un Breton saxon, joli paradoxe.

    Dans Icebergs et mers australes (2e partie du récit fait par Gérard Janichon du tour du monde du Damien, un voilier de 10m), l’auteur raconte leur circumnavigation des Kerguelen, visitées en décembre 1971 et janvier 1972. À la page 149 il est possible de lire ce qui suit : “En gagnant l’abri de l’île de l’Ouest, Port-Curieuse, nous baptisons au passage une île sans nom : Damien. Il reste si peu de découvertes aux conquérants avides !” Dans le menu déroulant de la carte IGN sur internet (site amapof.com) on trouve bien un “Curieuse (Port)”, mais il n’est pas possible de le voir sur la carte elle-même, ce qui est curieux. Quoi qu’il en soit, on peut se demander si le nom “Damien” a bel et bien été donné, officiellement, à l’île en question.

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  20. pour les prévisions
    La course aux lacs perdus

    Plus de 400 lacs ont été détectés sous la calotte antarctique. Si Vostok risque d’être le premier à recevoir de la visite, deux autres lacs feront l’objet de forage ces prochaines années. Ainsi, une équipe britannique a-t-elle annoncé un forage, dès 2012, dans le lac sous-glaciaire Ellsworth, un petit lac situé en Antarctique de l’Ouest. Un forage à l’eau chaude afin d’éviter tout risque de pollution. Une solution technique inenvisageable à Vostok, compte tenu de la température de la glace (- 57 °C) et de l’épaisseur de la calotte (3 750 mètres). L’année suivante, en 2013, ce sera au tour du lac sous-glaciaire Whillans d’être l’objet d’un forage de la part des Américains. Ce lac, proche de la plate-forme de Ross, en Antarctique de l’Ouest, a la particularité d’être connecté à l’océan. Tout comme à Vostok, un robot devrait ensuite le parcourir de long en large.
    http://www.larecherche.fr/content/actualite-vie/article?id=31314

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  21. banco sur la banquise :
     » because David Paige has so aptly caught certain phases of Antarctic colors on his canvases, I am grateful for his friendly interest.” In 1933, Paige applied for the position of Expedition Artist for Byrd’s Second Antarctic Expedition. Byrd replied that there would be no room for an artist, although he would have liked to take one. Although disappointed, Paige continued to pursue his dream of becoming the expedition artist through lobbying several members of the crew, as well as garnering letters of recommendation from the several important personalities of the day, including Senator Coolidge of Massachusetts, Dr. Andrews of the American Museum of Natural History, and Mr. Dart of the New York Times. It is unclear what finally changed Byrd’s mind, but in October 1933, Byrd conceded. David Paige would be the artist on the Second Byrd Expedition to Antarctica. »

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  22. ceScienceDaily (June 20, 2012) — At nearly four feet tall, the Emperor penguin is Antarctica’s largest sea bird — and thanks to films like « March of the Penguins » and « Happy Feet, » it’s also one of the continent’s most iconic. If global temperatures continue to rise, however, the Emperor penguins inTerre Adélie, in East Antarcticamay eventually disappear, according to a new study by led by researchers from the Woods Hole Oceanographic Institution (WHOI). n’est pas une histoire d’empire :
    « 

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  23. Nouveau venu dans le monde de la toponymie, à l’ignorance aussi dense que ma soif de connaissances, je me délecte en ces temps de confinement des posts de votre blog. Déjà, bravo!

    Sur les Kerguelen, je ne saurai que vous recommander « L’arche des Kerguelen » de Jean-Paul Kauffman, qui revient longuement sur l’histoire pas si tranquille que ça de l’archipel, à l’occasion d’un voyage sur place au début des années 90. Il a pu alors échanger avec l’un des habitués de Kerguelen, qui a eu la chance de pouvoir nommer certains des lieux de Kerguelen. L’auteur:
    « En allant au Val Travers, j’ai traversé le Val d’Aoste, le Val Grisanche, Courmayeur. Est-ce vous qui les avez baptisé ainsi?
    -Oui, c’est moi, nous avons fait cette exploration en juin et septembre 1961 (…) Je ne voulais pas me servir des Kerguelen pour imposer ma cartographie personnelle, comme beaucoup le faisaient à l’époque. C’était pour moi aussi idiot que de graver des cœurs sur un arbre. » (p.194)

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