Personne n’a rejoint le quatuor de « solutionneurs » de ma dernière devinette. Il fallait trouver Barbaste, petite commune de l’arrondissement de Nérac en Lot-et-Garonne.
Le nom de Barbaste est vraisemblablement un nom de type commémoratif destiné à glorifier la reconquête chrétienne en 1064 de la ville de Barbastro en Aragon, à laquelle participa notamment Guy-Geoffroi duc d’Aquitaine, comte de Poitou et de Bordeaux.
Exemple de reconversion réussie d’une église
Le même désir de commémoration a fait baptiser Barbâtre, une commune de Vendée, attestée Barbastrum au XIIè siècle puis Barbastra, Barbastria et Barbastre au XIIIè siècle. Plusieurs étymologies populaires font dériver le nom de cette commune de l’île de Noirmoutier du mot « barbare », faisant allusion à de possibles Barbares (non-Romains, donc) quasi éponymes. C’est ainsi qu’a été mis à contribution le peuple gothique des Taïfales, mercenaires des armées romaines qui auraient bâti là un Barbarum atrium … D’autres préfèrent y voir le souvenir d’un pirate nommé Barbaste interprété en Barbe noire. Les Noirmoutrins rapportent encore la légende « selon laquelle les Barbâtrins tireraient leur nom (…) de pratiques de naufrageurs locaux se livrant à des actes de barbarie contre les équipages des navires échoués dans la baie de Bourgneuf-en-Retz » ( Dictionnaire des noms de lieux de la Vendée, Jean-Loïc Le Quellec, Geste Éditions, 1995).
Quant au nom Barbastro de la ville aragonaise, il reste mystérieux. Les premières mentions sont le fait des Arabes qui parlaient de Barbaschter, que tout le monde s’accorde à comprendre comme une arabisation d’un nom préexistant Barbastrum, sans étymologie assurée. Il pourrait s’agir d’une suffixation latine d’un mot pré-latin ou ibère non identifié.
Les indices
Il était question dans l’énoncé de la devinette d’un roi de France qui aimait se dire meunier de Barbaste. Il fallait penser à Henri IV, fils de Jeanne d’Albret et donc propriétaire du moulin familial de Barbaste :
Le moulin de Barbaste, Philippe de Lauzun, 1902
Ledit moulin existe toujours, sur la Gélise, partagé entre Nérac et Barbaste. On l’appelle Moulin des Tours de Barbaste, Moulin Henri IV, Moulin des Quatre Tours, etc.
La chanson interprétée par Bobby Lapointe s’intitule Aragon et Castille, une allusion tout en douceur à la région d’origine de Barbastro.
Quant aux quatre tours madrilènes, c’était l’indice trois-en-un : les quatre tours comme celles du moulin de Barbaste, le chiffre quatre comme Henri IV et l’Espagne pour Basbatro.
L’autre nom de « Le Roi et le Meunier », de Collé, est «La Partie de chasse de Henri IV » :
https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Partie_de_chasse_de_Henri_IV
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1642282.image
L’histoire de Capchicot, narrée au chapitre 2 du livre de Jules Andrieu, lui ressemble beaucoup (mais, là, il s’agit d’un charbonnier) :
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3178190/f7.item.texteImage
C’était vraiment un diable à quatre … tours à son moulin !
J’aimeJ’aime
Le « Tresor dou Felibrige signale un La Barbastié près de Valence (Tarn) et un La Barbastie (Dordogne) /
https://www.lexilogos.com/provencal/felibrige.php?q=BARBASTE
https://www.google.fr/maps/place/La+Barbasti%C3%A9,+81340+Valence-d'Albigeois/@44.0094261,2.3570361,15z/data=!4m5!3m4!1s0x12adf3e95a349ccf:0x1bdd4987d50e4771!8m2!3d44.009428!4d2.365791?authuser=0
Il y est aussi question du Barbatés, « ancien pays du comté de Foix, dans la vallée d’Aran » (que je n’ai su repérer).
———————
On trouve à La Barbastie un GAEC spécialisé dans l’élevage d’ovins :
« Présentation de la société GAEC DE LA BARBASTIEGAEC DE LA BARBASTIE, groupement agricole d’exploitation en commun a été en activité durant 17 ans. Localisée à VALENCE D’ALBIGEOIS (81340), elle était spécialisée dans le secteur d’activité de l’élevage d’ovins et de caprins. »
https://www.societe.com/societe/gaec-de-la-barbastie-390132116.html
À supposer que ce type d’élevage remonte là à l’Antiquité, ne pourrait-on pas supposer que, tout comme pour la charentaise Barbezieux, on ait affaire à des bergeries, ces toponymes tirant leur nom du latin « vervex, ecis »(= « mouton », « bélier »), qui a donné aussi « brebis » et « berger ».
[Laissons de côté l’hypothèse où il s’agirait de repaires de barbastelles, ravissantes chauves-souris …]
J’aimeJ’aime
À noter qu’il existe une chanson de geste, Le siège de Barbastre, qui appartient au cycle de Guillaume d’Orange /
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8492/f1.item
http://www.theses.fr/1991AIX10016
https://books.google.fr/books?id=ZbYzuXeV1xUC&pg=PA61&lpg=PA61&dq=PSEUDO+TURPIN+BARbASTRE&source=bl&ots=I1dEebI7hS&sig=ACfU3U2Fbg9V82rsocKhffNxFIcH1ywE7Q&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjT0ZX2qM7wAhUOkRQKHXZuCFgQ6AEwEXoECBAQAw#v=onepage&q=PSEUDO%20TURPIN%20BARbASTRE&f=false
J’aimeJ’aime
►TRA
Il est en effet difficile de faire le tri entre les toponymes liés à l’occitan barbasto, « gelée blanche », au pré-indo-européen bar (gaulois * barro , « sommet »), au latin latin vervex , « brebis » (même si la suffixation en aste ne soit pas signalée dans les ouvrages dont je dispose) ou encore à l’aragonaise Barbastro … Malheureusement, les formes anciennes de ces toponymes manquent souvent cruellement et empêchent de se faire une opinion définitive.
_______________________________________________
Merci pour la chanson de geste !
J’aimeJ’aime