Pour en finir avec l’aulne, qui m’a déjà occupé ici, là et encore là, et avant la publication du billet dominical accompagné de sa traditionnelle devinette, je publie cet addendum pour être sûr de ne rien oublier ( enfin, je crois…).
Une dizaine d’hagiotoponymes sont déterminés par le nom de l’aulne, soit dérivé du latin alnus soit du gaulois vernos :
Saint-Clément-de-Vers et Saint-Igny-de-Vers dans le Rhône ;
Saint-Colomban-de-Vair dans la Sarthe ;
Saint-Georges-d’Aunay et Saint-Paul-de-Vernay dans le Calvados ;
Saint-Germain-d’Aunay dans l’Orne ;
Saint-Germain-les-Vergnes en Corrèze ;
Saint-Laurent-la-Vernède dans le Gard ;
Saint-Martin-de-Vers et Saint-Paul-de-Vern dans le Lot.
Outre Broût-Vernet ( Allier ), vu dans la précédente devinette, d’autres toponymes sont des noms composés :
La Chapelle-Launay ( L.-Atl.) ;
Châteauneuf-de-Vernoux ( Ardèche ) ;
Commelle-Vernay ( Loire ) avec commelle diminutif du franco-provençal courme, colme, « sommet de montagne » ou bien diminutif du latin columna, « colonne », rappelant une borne romaine ;
Église-Neuve-de-Vergt ( Yonne ) ;
Magny-Vernois ( avec Magny dérivé ici du latin mansionile, « maison de paysan », comme ménil et non de Magnius avec le suffixe –acum qui donne –ey en Haute-Saône ) et Mont-le-Vernois ( H.-Saône ) ;
Port-Launay ( Fin. ) ;
Prades-sur-Vernazobre ( Hér., avec Prades du latin pratum, « pré, prairie » ) ;
Salles-les-Aulnay ( Char.-Mar., avec Salles dérivé du germanique seli, allemand Saal, « chambre » puis « château ») est un faux ami puisque cet Aulnay-là est issu du nom d’homme gaulois Aunedos et suffixe –acum [ merci à TRA pour sa relecture attentive ! ].
Veyrines-de-Vergt ( Dord., avec Veyrines dérivé du latin veterinæ, « bêtes de somme », désignant l’écurie d’un relais routier ou du latin *vitr-ina, « verrerie », mais il y a six Veyrines en Dordogne …).
Seuls TRS et TRA, une fois de plus, sont parvenus à résoudre mes dernières devinettes que je recopie ici pour les retardataires :
Il vous faudra chercher les noms, composés sans trait d’union, de deux villages de France métropolitaine liés à la racine celtique verno, « aulne ».
■ le premier nom signale, selon l’hypothèse la plus souvent admise, la source d’un cours d’eau bordé d’aulnes dont les vertus étaient déjà connues des Gaulois de la région puis des légionnaires romains et qui font encore la réputation de la commune, au point que celle-ci a ajouté à son nom, officieusement, un déterminant y faisant allusion.
Trois indices pour le prix d’un ( mais j’aurais pu allonger la liste ! ) :
■ le deuxième nom signale la source d’un cours d’eau bordé d’aulnes. Ah ben oui, tiens !, comme le premier … mais elle s’en distingue par son faible débit et son absence de vertu particulière.
Un seul indice, mais c’est vraiment cadeau :
et un esprit malin pourrait même y voir un indice pour le premier nom !
Et je rajoute ces deux indices, toujours dans l’ordre :
Je continue aujourd’hui l’étude des toponymes liés à l’aulne commencée dans ce billet.
La racine celtique verno, « aulne », a abouti en ancien français à verne ou vergne, encore attestés dans de nombreux dialectes au sud d’une ligne allant de l’embouchure de la Loire aux Vosges. Les toponymes formés sur cette racine sont fort nombreux, bien plus que ceux formés sur alnus ; il serait fastidieux de tous les citer, je me contenterai donc des noms de communes actuelles, laissant de côté les anciennes communes et les micro-toponymes :
L’arbre isolé
De la forme simple verno signalant un arbre isolé ( point de repère pour un carrefour, un gué ou servant de totem à un établissement rural, etc. ) sont issues les formes :
Vaire-sous-Corbie (Som.) et Vaires-sur-Marne ( S.-et-M.) ;
Vars ( Char.,Varno en 1020) ;
Ver ( Manche ), V.-lès-Chartres (E.-et-L.), V.-sur-Launette ( Oise, Vern en 846, avec Launette du gaulois onno , cf. première partie ), V.-sur-Mer ( Calv.) ;
Vergt ( Vernium en 1158, Dord. ), V.-de-Biron ( Auver en 1053, à comprendre au vern, id.) ;
Vert ( Landes, Yv.), V.-en-Drouais ( E.-et-L.), V.-le-Grand et V.-le-Petit ( Ess.), V.-Saint-Denis ( S.-et-M. ), V.-Toulon ( Marne), qui ont subi l’attraction de l’adjectif de couleur ;
avec l’article au féminin : La Vergne ( Ch.-Mar.).
L’aulnaie
■ avec le collectif -etum :
Vernais ( Cher ), Vernay (Rhône) ;
Vernet ( H.-Gar. ), V.-les-Bains et V.-Chaméane ( P.-O ), Le Vernet ( Allier, Alpes-de-H.-P., Ariège et H.-Loire ), Le V.-Sainte-Marguerite ( P.-de-D.), et Verneix ( Allier ) ;
Vernoil-le-Fourrier ( M.-et-L.), Vernou-la-Celle-sur-Seine ( S.-et-M., Vernoilo en 1005 puis Verno en 1202 ) ;
diminutif : Vernouillet ( E.-et-L.).
■ avec le latin solum, « partie la plus basse, bas-fond » : Lavernose-Lacasse ( H.-Gar., Vernasole au IVè siècle) ;
■ avec le pré-celtique -osc : Vernosc ( Ardèche ) ;
■ avec l’article agglutiné : Lavergne ( Lot, L.-et-G.), Lavernhe ( Aveyr.), Lavernat ( Sarthe, avec suffixe -acum appliqué à un végétal ), Lavernay ( Doubs, même remarque ), Lavernoy ( H.-Marne, avec suffixe -etum ) ;
■ les noms composés sont curieusement peu nombreux : le Longeverne de La Guerre des Boutons est un toponyme fictif mais un Longeverne existe à Beaufort-Orbagna ( Jura ) et un Longuevernhe à Coupiac (Aveyron ). On connait toutefois un Belverne ( H.-S.) et un Beauvernois ( S.-et-L.).
Notons que les faux amis sont nombreux comme Vars ( H.-Alpes), Varcium en 1154, qui provient d’un nom d’homme germanique Waracius. Le nom de personne gaulois Brennos a donné des noms en Berneuil, le gallo-romain Vernius a donné Vergné ( Ch.-M., Vergnec en 1183) et Verny ( Mos., Wergney en 1329) et le nom germanique Warno a fourni des Vernéville, etc. C’est une preuve de plus, s’il en fallait, qu’il faut dans la mesure du possible se référer à la forme la plus ancienne du toponyme pour en déceler le sens exact.
Les cours d’eau
Le Vernazobre
L’aulne est un arbre des bords humides des rivières et des étangs ; il est d’ailleurs tout à fait possible que la racine celtique vern– ait pu désigner aussi bien l’arbre que, par métonymie, le lieu humide lui-même. On trouve couramment associé ce mot avec le gaulois dubron, « eau courante », pour former des noms de cours d’eau comme Vernazobre(s) ( Vernodubro, confluence à Saint-Chinian ), Vernazoubre ( confluence à Truscas ) et le Vernoubrel ( confluence en aval de Bédarieux ), tous trois affluents de l’Orb ( Hérault ). On peut citer encore le Bernazoubre ( affluent du Sor, dans le Tarn ), le Vernoubre ( affluent de l’Agout dans l’Aveyron ), le Vernobre ( affluent du Rance dans l’Aveyron) et le Verdouble ( Vernodubrun chez Pline l’Ancien, affluent de l’Agly dans les Pyr.-Or.). La même racine verno employée avec un inhabituel suffixe collectif –atione a fourni son nom à un affluent de la Loire à Cros-du-Géorand ( Ardèche ), Le Vernazon.
Les devinettes
Deux devinettes aujourd’hui, voyez comme je prends soin de vous ! Il vous faudra chercher les noms, composés sans trait d’union, de deux villages de France métropolitaine liés à la racine celtique verno, « aulne ».
■ le premier nom signale, selon l’hypothèse la plus souvent admise, la source d’un cours d’eau bordé d’aulnes dont les vertus étaient déjà connues des Gaulois de la région puis des légionnaires romains et qui font encore la réputation de la commune, au point que celle-ci a ajouté à son nom, officieusement, un déterminant y faisant allusion.
Trois indices pour le prix d’un ( mais j’aurais pu allonger la liste ! ) :
■ le deuxième nom signale la source d’un cours d’eau bordé d’aulnes. Ah ben oui, tiens !, comme le premier … mais elle s’en distingue par son faible débit et son absence de vertu particulière.
Un seul indice, mais c’est vraiment cadeau :
et un esprit malin pourrait même y voir un indice pour le premier nom !