Pichoultres à Auzits (Av.) et le Valat d’Outrijasses à Altier (Loz.) : les répauxdev

Fin du suspense pour les amateurs de devinette !

LGF est le seul à m’avoir donné les bonnes réponses à mes dernières devinettes ! Félicitations !

Capture 1 Il fallait trouver Pichoultres, un lieu-dit d’Auzits dans le canton d’Enne et Alzou de l’arrondissement de Villefranche-de-Rouergue, en Aveyron.

Auzits, c’est là :

local auzits

Et Pichoultres, ici, en haut à droite :

PICHOULTRES A Capture GEOP

Pichoultres :

On trouve le nom de ce lieu-dit encore écrit Puech Oultres ou  Puechoultres, comme sur la carte de Cassini (feuillet 16, Rodez, 1781). On reconnait dans ce nom le terme puech, issu du latin podium, désignant une colline de forme arrondie au sommet plat, suivi de la préposition outre : il s’agit de « la colline de l’autre côté », pour ceux qui venaient du Fromental et passaient le pont sur le Riou Mort.

PICHOULTRES B Capture GEOP

Le –s final de Pichoultres est ce que les linguistes appellent une paragoge.

Auzits : le nom de cette commune est la forme gasconne d’auseto ou èuseto, désignant un bois d’yeuses ou chênes verts (Quercus ilex), du latin ilicetum, lui-même d’ilex, ilicis et suffixe collectif –etum. La finale gasconne –its, correspondant à –et ou –ec, a déjà été rencontrée à propos d’Aramits.

■ canton d’Enne et Alzou :

Enne : le nom de ce cours d’eau pourrait être issu de la racine hydronymique pré-celtique *en , à rapprocher de l’irlandais en, « eau », à l’origine par exemple du nom de l’Ain.

Alzou : ce nom est probablement issu du gaulois *alisa, « aulne », qui pouvait désigner un lieu humide.

Aubin : sans surprise, le nom de cette commune est issu du nom d’homme latin Albinus, non suffixé.

Villefranche-de-Rouergue :

♦ comme son nom l’indique, Villefranche était … une ville franche (vues ici).

Rouergue : le nom du pays est attesté in Roteneco en 629-37, in pago Rutenico en 640-47. Il s’agit d’une formation du haut Moyen Âge sur le nom ancien de son chef-lieu Rodez, Ruteni muni du suffixe latin –icu, sur le nom des Rutènes qui l’occupaient. Les attestations ultérieures montrent bien l’évolution phonétique : *Rutenicu donne Rodanege attesté avant 1105 puis Rodengue en 1150, Rodergue en 1132 et Roergue en 1129 d’où est issue la forme française Rouergue dès 1512. Le nom des Rutènes serait formé du préfixe augmentatif celtique – (formé par la perte du p– initial de *prŏ-, « en avant », « devant ») suivi du thème celtique *tēno-, « chaleur, feu » (de *tepno-, issu d’une racine indo-européenne *tep-, « chauffer ») et pourrait signifier « les très chauds ou très ardents (guerriers) » (Jacques Lacroix, Le nom des Rutènes, Revue des études-anciennes, 2013, t. 115, n°1, p. 51-70. – en ligne).

Capture 2 Il fallait trouver Le Valat d’Outrijasses, de la commune d’Altier du canton de Saint-Étienne-du-Valdonnez dans l’arrondissement de Mende, en Lozère.

Altier, c’est ici :

local altier

Le Valat des Outrijasses, là, à droite :

OUTRIJASSES Capture GEOP

Le Valat des Outrijasses :

Valat : pour tout savoir sur ce toponyme je vous renvoie à ce remarquable article, dans lequel on apprend que « ce terme a pris le sens de torrent » [se citer soi-même est un plaisir !].

Outrijasses : ce nom est formé de la préposition outre suivie de jasse, de l’occitan jaça, lui-même issu du latin jacere, « gésir », désignant l’endroit où le berger et ses animaux se couchent, le gîte et la bergerie. Selon ce nom, le valat était situé au-delà des parcs à moutons, en marquant sans doute la limite.

Altier : attesté de Alterio en 1249 et Castrum de Alterio en 1307, issu du latin altarium, de altare, « autel », qui a pu désigner un autel païen ou avoir plus simplement le sens topographique de « hauteur ».

Saint-Étienne-du-Valdonnez :

Cette ville figurait dans un article consacré au Pic de Cassini, où le Valdonnez est expliqué comme issu du gaulois vallis dunum, la « citadelle de la vallée », identifiée au Truc de Balduc.

Mende :

Ce toponyme, référence au Mont Mimat divinisé par les Gaulois, a été expliqué dans cet article et dans cet autre.

Les indices

Ah, ben non! Il n’y en avait pas …

Le col de Vielbougue en Lozère : la répàladev

sommet-du-colI

Il fallait trouver le Col de Vielbougue (866 m), sur la route de Mende à Marvejols entre Barjac et Palhers, situé sur la commune d’Esclanèdes du canton de Bourgs-sur-Colagne dans l’arrondissement de Mende en Lozère, dans le Gévaudan.

Esclanèdes, c’est là :

et le col de Vielbougue, ici, au nord d’Esclanèdes :

col de Vielbougue Esclanèdes Capture GEOP

et, ici, entre Palhers à l’ouest et Barjac à l’est :

Le col de Vielbougue (flèche rouge), Esclanèdes (1), Palhers (2) et Barjac (3)

60px-Asterism.svg

La toponymie

Vielbougue : ce nom est formé sur l’adjectif viel, « vieux » et sur bougue, une des formes patoises issues du gaulois bodica, « terre écobuée ».

Esclanèdes : ce nom est formé avec le suffixe collectif féminin latin –eta (donnant –ède en occitan) sur le diminutif *aesculanus du latin aesculus qui désignait une catégorie de chêne, le rouvre, consacrée à Jupiter. J’avais parlé de cette commune dans une de mes réponses à celui qui signe lecteur, en commentaire de ce billet.

Bourgs-sur-Colagne : la première partie de ce nom ne fait pas de difficulté. Le nom de la rivière Colagne est issu d’une racine oro-hydronymique pré-celtique *col.

Mende : ce toponyme, lié à la divinisation du Mont Mimat, a été expliqué à deux reprises sur ce blog, dans ce billet et dans cet autre.

Gévaudan : le nom de cette région, issu de celui des Gabales, a été vu dans le second billet cité à propos de Mende.

Palhers : en occitan, un palher désignait une meule de paille ou un grenier à paille et aussi, particulièrement dans le Massif Central, une maison au toit de paille, une chaumière.

Barjac : ce nom est formé, sans surprise, sur celui d’un homme latin Bargius ou Barbius, accompagné du suffixe –acum.

60px-Asterism.svg

Les indices

indice 07 04 2024 ■ le pape Urbain V (1310 -1370), né au Pont-de-Montvert en Lozère, dans le Gévaudan, eut à cœur, tout au long de sa vie pontificale, de favoriser son pays et notamment la ville de Mende, dont il se réserva l’évêché.(wiki)

indice b 07 04 2024 ■ il fallait reconnaitre un détail de l’affiche du film Le Pacte des loups, qui raconte l’histoire de la Bête du Gévaudan.

Le lieu-dit Pertuzades à La Tieule (Loz.)

podium seul  LGF est resté le seul à m’avoir donné la réponse à ma dernière devinette. Bravo !

Il fallait trouver le lieu-dit Pertuzades à La Tieule, canton de La Canourgue, arrondissement de Mende, en Lozère.

La Tieule, en Lozère, c’est ici :

la-Tieule

et Pertuzades, c’est là :

Pertuzades Capture GEOP

cdl d

Toponymie

Pertuzades : il s’agit d’un dérivé en -ada de pertús, littéralement traduisible par « trouée », mettant l’accent sur l’aménagement d’un passage difficile en montagne. Le pluriel, tardif, ne s’explique pas.

La Tieule : noté La Tioule sur la carte de Cassini (feuillet 55, Mende, 1779), ce nom est issu de l’occitan teulo, tieulo (du latin tegula), que F. Mistral (TDF*) définit comme « dalle, pierre plate, ardoise ; voir lauso », ce dernier mot étant lui-même défini : « pierre plate et mince servant à couvrir les maisons ».

CaptureTEULO TDF                                       Capture LAUSO TDF

Dans les régions au sol schisteux, comme ici, la teulièra n’est pas une tuilerie, mais une carrière d’ardoise ou de lauze. On trouve dans la même région un nombre important de toponymes où la teula est citée au singulier ou au pluriel .

La voûte recouverte de lauzes traduit le nom du village (La Tuile) et permet de marquer le patrimoine architectural de la commune typiquement caussenard avec ces toits de lauzes sur voûte.

La Tieule et ses toits de lauze

À la Tieule, murs de pierres et toits de lauzes

La Canourgue : attesté (ecclesia) canonica en 1060, c’est-à-dire «  église collégiale placée sous l’autorité d’un chanoine ».  Ce nom avait été expliqué ici-même en 2015 dans un article consacré à l’église.

Mende : c’est Grégoire de Tours qui, le premier en 575-94, évoque le martyre de saint Privat in criptam Memmatinsis montis. Il cite plus loin la ville, ex Mimate. La forme originelle est donc Memmate qui, accentuée sur la première syllabe, est à l’origine de Mende. Ce nom est issu du gaulois *menman, « pensée, prière ; intelligence, esprit », muni du suffixe locatif gaulois –ate. Ce même radical se retrouve dans des noms de divinités celtiques, Menmandutiae à Béziers, Minmantiae à Périgueux, Menmanhia à Rome. Il est très probable que la montagne sise au dessus de la ville de Mende a fait l’objet d’un culte, comme c’était alors fréquent ; c’est sur le flanc de cette montagne que se trouvait l’ermitage de saint Privat où il fut découvert et martyrisé par les Alamans. La montagne est appelée le Mont Mimat depuis 1724 environ, mais porte toujours, localement, le nom de lou Truc (de Saint-Privat) : l’appellation Mont Mimat n’est qu’une réfection d’érudits locaux. La forme originelle Mimate du nom de la ville est passé régulièrement en occitan à Memde en 1152 et graphié Mende en français en 1318. (DNLF*). Ce toponyme avait déjà été expliqué ici-même en juillet 2022 dans cet article.

*Les abréviations en gras suivies d’un astérisque renvoient à la bibliographie du blog, accessible par le lien en haut de la colonne de droite.

cdl d

Les indices

indice a15 10 2023  ■ Le Pont de Montvert, peint en 2017par Lydia Guigo, montrait un village lozérien aux toits de lauzes, comme à La Tieule.

indice a 17 10 2023 ■  ce Portrait d’un chanoine (Jean Chalette, 1581-1643) devait orienter vers l’étymologie du nom de La Canourgue. Le choix volontaire du portrait d’un chanoine non identifié montrait que ce n’était pas le personnage qui constituait un indice, mais sa fonction.

indice b 17 10 2023 ■ sur cette affiche d’un spectacle donné au théâtre du Chêne noir d’Avignon en 2022, il fallait reconnaître Céleste Albaret, servante de Marcel Proust, née en 1891 à Auxillac, commune intégrée en 1973 à La Canourgue.

indice c 17 10 2023 ■ cette représentation d’une carrière de lauzes, qui devait orienter vers La Tieule, est issue de ce site qui explique tout sur la lauze.