La bouzigue

Je quitte la jachère (I et II) pour m’intéresser à un mot de langue d’oc que les plus attentifs de mes lecteurs auront vu passer à plusieurs reprises comme ici ou encore . Il s’agit de l’occitan bosiga (masculin bosic, présent notamment dans les Pyrénées) que le Pégorier (GTD*) définit comme  « essart, terrain défriché par le feu, écobuage ». Au Moyen Âge, il s’agissait d’une « parcelle d’exploitation temporaire, taillée ou brûlée de temps à autre dans les friches » (E. Le Roy-Ladurie, Montaillou, village occitan de 1294 à 1324, coll. Folio, Gallimard, 1982) : c’est l’écobuage qui caractérise la bouzigue, qui est donc un terrain conquis par le feu sur la forêt ou les broussailles mais encore insuffisamment amendé ou simplement un terrain d’exploitation temporaire. En ce sens, la bouzigue se distingue de l’artigue qui ne résulte pas nécessairement d’un écobuage et n’a pas la même connotation de terre au maigre rapport (et qui devrait faire l’objet d’un prochain billet).

Étymologiquement, ce terme vient du gaulois boudica, « conquête, profit de la victoire », en ce sens qu’il s’agit d’une terre gagnée sur la forêt ou les broussailles. On rapprochera ce terme de Boudicca, nom déformé en Boadicée, reine des Icènes, dans l’Angleterre actuelle, qui se révolta contre les Romains au Ier siècle. On trouve également Boudica, nom de femme sur une inscription en Espagne. Sur le même étymon gaulois ont été formés le gallois budd et le vieil irlandais buaid, « conquête, profit, victoire ». L’occitan bosiga, « terrain en friche ou d’exploitation temporaire » a donné le verbe bosigar, « fouiller avec le groin, défricher » et le franco-provençal bouziquer, « travailler pour une maigre résultat ; travailler sans entrain ».

La majorité des toponymes issus du gaulois boudica ont été formés de quatre façons : avec affaiblissement du c intervocalique en g, aboutissant à boudigue ; avec passage du d à z, aboutissant à bouzigue ;  avec disparition du d intervocalique, aboutissant à bouigue ; enfin, avec palatalisation du g en j, aboutissant à bouige en nord-occitan.

Boudigue

Les toponymes ayant conservé la forme la plus proche de l’original gaulois boudica sont peu nombreux, moins de cinquante présents en Occitanie et Nouvelle-Aquitaine, comme Boudigue (Dax, Habas, Misson, etc. dans les Landes), Boudigues (Binos, Riolas, etc. H.-G ; Cabanac, Gir. etc.), Grand Boudigue (Saint-Vincent-de-Paul, Landes) ainsi que, avec l’agglutination de l’article, Laboudigue (Dax, Méés. etc, Landes ; Escos, P.-A. etc.) et, en diminutif, Las Boudiguettes (Saint-Bertrand-de-Comminges, H.-G.).

Boudig-en-Bretagne

Bouzigue

Les formes avec d passé à z sont bien plus nombreuses, qu’elles s’écrivent avec un z (au moins 225 toponymes) ou avec un s (plus de 180), et se trouvent très majoritairement en Occitanie et quelques unes en Nouvelle-Aquitaine.

On trouve ainsi, avec le z, des noms comme (La, Las ou Les) Bouzigue(s), parmi lesquels celui de la commune de Bouzigues (Hér., de Bocigis en 1146). Notons un redondant Bouzigue Brûlée à Beaumon-de-Lomagne (T.-et-G.). Le diminutif est représenté par Bouziguet (Le Passage et Calignac, L.-et-G.),  Bouziguette (Montlaur, Av.) et les pluriels Lous Bouziguets (Gorges-du-Tarn-Causses, Loz.), Las Bouziguettes (Massac, Aude etc.) ou Les Bouziguettes (Villefort, Aude etc.). L’agglutination de l’article a donné des noms comme Labouzigue (Marmande et Mauvaisin-sur-Gupie, L.-et-G.) et Lasbouzigues (Roquebrune, Gers, etc.).

Bouzigues-2

Bouzigues (Hér.) sur l’étang de Thau, je ne m’en lasse pas

Moins nombreux, avec le s mis pour le son z, apparaissent là aussi des noms comme (La, Las ou Les) Bousigue(s), dont une Bousigue Bieille, c’est-à-dire « vieille», à Sautel (Ariège), des Bousigues Médiocres et des Bousigues Doulentes à Néfiach (P.-O.) dont on se demande bien si elles valaient la peine … Les diminutifs se trouvent au Bousiguet (Biran, Gers), à la Bousiguette (Ax-les-Thermes, Ar. etc.) et aux Bousiguettes (Millau, Av.) ainsi qu’au Bousigou (La Cadière-et-Cambo, Gard). Plus rares, les noms avec agglutination de l’article sont représentés par Labousigue (Montastruc-la-Conseillère, H.-G. ; Roquefort et Seyches, L.-et-G.) ainsi qu’à Lasbousigues (Layrac, L.-et-G. ; Séron, H.-P.).

La forme masculine bosic, que j’ai signalée dans l’introduction, n’a donné que quelques toponymes dont celui de la commune de Bouzic (Dord., Bozicum en 1283), du Grand et du Petit Bouzic à Cocumont (L.-et-G.) et des Bouzics à Lanoux et Bonnac (Ariège).

Bouygue

Plus de quatre cents toponymes ont été formés sur bodica avec disparition du d intervocalique mais persistance du son [g], aboutissant à des noms du type bouigue.

Sans surprise, on trouve des noms comme (La, Las ou Les) Bouygue(s), parfois qualifiées de Longue, Haute, Basse, Grande … et même Redonde, c’est-à-dire « ronde », à Pailherols (Cant.). On trouve également les diminutifs habituels Bouyguets (Saint-Eutrope-deBorn, L.-et-G.), (La) Bouyguette (Vaylats, Lot, etc.) et (Las ou Les) Bouyguettes (Montan, Tarn etc). L’agglutination de l’article a donné une trentaine de Labouygue(s), à peu près autant de Lasbouygues et quelques Labouyguette (Esclauzels, Lot etc.). Notons pour finir un inattendu masculin Le Bouygue (Montsalès, Av. et Saint-Marcel-Campes, Tarn.).

L’orthographe ayant conservé le i se retrouve dans une quarantaine de noms sans surprise comme (La, Las ou Les) Bouigue(s) et à La Bouiguette (Massegros-Causses-Gorges, Loz.).

Sur le même modèle ont été formés les noms des Buigues (Saint-Martin-de-Boubaux, Loz. ; Saint-André-de-Valborgne, Gard etc.) et des Grandes Buigues (La Chapelle-Saint-Martial, Gard).

Bouige

Lorsque le son [g] de bouigue s’est palatalisé en [j], sont apparus des noms en bouige ainsi que des variantes comme boige et buige.

Cette palatalisation du g entre deux voyelles s’est naturellement produite en nord-occitan et parfois même hors du domaine d’Oc. C’est ainsi qu’on trouve, dans le Doubs, les noms des communes de Boujailles (Botgalia en 862, Bougaillie en 1266 et Boujailles dès 1311) et de Boujeons (Boujun au XIIIè siècle), tous deux issus du gaulois bodic-, le premier avec le suffixe –alia, le second avec –one.

CPA Boujailles

Voilà pourquoi je préfère l’Hérault au Doubs

En Auvergne et dans tout l’ouest du Massif central, le champ où l’on alternait mise en culture et pâture, la terre labourée restée longtemps sans culture ou la jachère longue de 3 à 5 ans qui sert de terrain de pacage étaient fréquemment nommés par un de ces mots.

Les noms comme (La ou Les) Bouige(s) sont présents à près de six cents exemplaires dont plus d’un tiers en Nouvelle-Aquitaine, un tiers en Centre-Val-de-Loire (la majorité dans le seul département de l’Indre) et le reste en Auvergne-Rhône-Alpes, Occitanie, PACA et Pays-de-la-Loire. Les qualificatifs les plus présents sont Grande(s), Petite(s), Blanche(s) … mais on trouve aussi la Bouige Noire (Neuvic, Corr.), la Bouige Rouge (Azat-le-Ris, H.-Vienne etc.), la Bouige Verte (Chaveroche, H.-Vienne), la Bouige Dorée (Le Vigeant, Vienne) etc. Les déterminants habituels sont aussi représentés : les animaux avec la Bouige aux Mulets (Parnac, Indre), aux Boeufs, aux Veaux et aux Agneaux (Lignac, id.), etc. ainsi que la Bouige au Curé (Chenevelles, Vienne), à Fripon (Chaillac, Indre), à Poil (Millac, Vienne), etc. et même une Bouige à la Morte (Prissac, Indre). Des diminutifs apparaissent avec le Bouiget (Bouesse, Indre etc.), la Bouigette (Le Buisson, Loz. etc.), les Bouigeons (Chaillac, Indre etc.), les Bouigeottes (Espartignac, Corr.) etc.

La graphie avec y n’est présente qu’en pays de langue d’oc, à près de deux cents exemplaires, très majoritairement en Nouvelle-Aquitaine (Dordogne et Corrèze notamment). Ils sont du même type que les précédents soit (La ou Les) Bouyges plus un pluriel Las Bouygeas en Dordogne (Hautefort, Quinsac etc.) et les déterminants habituels. Outre les diminutifs attendus en –ette ou –otte, on notera Bouygeonne (Veyrières, Cant.) et Bouygeounnes (Moussages, id.).

On compte plus de 880 (La ou Les) Buge(s) ou (Las) Bugeas en Auvergne-Rhône-Alpes, souvent accompagnés de déterminants ou de qualificatifs sans grande originalité sauf les redondants Bugedefeu à Saint-Georges-d’Aurac (H.-Loire) et les Buges Brûlées à Novacelles (P.-de-D.). Là aussi, les diminutifs sont en –ette ou –otte et on trouve également un augmentatif péjoratif avec Les Bugeasses à Saint-Jean-d’Aubrigoux (H.-L.)

La variante boige est à l’origine de près de 300 noms comme (La ou Les) Boige(s), bien présents en Nouvelle-Aquitaine, Auvergne-Rhône-Alpes et, dans une moindre mesure, en Bourgogne-Franche-Comté, Pays-de-la-Loire etc. Les qualificatifs, déterminants et diminutifs sont sans surprise mais je signale tout de même la Boige du Soulard à La Roche-Chalais (Dord.) et la Boige de Nègreloube, « de la louve noire », à Saint-Yrieix-la-Perche (H.-Vienne).

La variante buige a été presque aussi prolifique, avec près de 260 noms comme (La ou Les) Buige(s) en Nouvelle-Aquitaine et Auvergne-Rhône-Alpes. Je passe les diminutifs, les qualificatifs et déterminants qui n’apportent rien d’original sauf peut-être avec les Buiges Pelées à Herment (P.-de-D.)  et le Peu des Buiges à Augères (Creuse) où peu est une variante de puy.

Une autre variante n’apparait qu’à trois exemplaires, deux dans l’Indre, Biouge à Clion et les Biouges à Jeu-les-Bois, et un en Ardèche, les Biouges à Coucouron.

Les autres

Avec des prononciations et donc des graphies variées, on trouve des noms comme la Bousige (Montrodat, Loz.), les Bousiges (Portes, Gard, Mansus de Bosegiis, qui est juxta Portas en 1294), les Bouziges (Sanilhac, Ardèche, Bosigi en 1464) ou encore la Boussigue (Trélans, Loz.).

À Saint-Julien-d’Arpaon (Loz.) le hameau de Bougès (mansum appellatum de Boges) porte lui aussi un nom issu du gaulois bodica, accompagné du suffixe –ensis, nom qui est passé à la montagne qui le surplombe, le Mont du Bougès (1324 m). Dans le même département, à Cassagnas, on rencontre le diminutif Bougéset.

Enfin, le bas-latin *bodicarius, « défricheur », a donné son nom à Bouziès (Bozies en 1287), une commune du Lot, et à quelques lieux-dits homonymes à Ciurac et à Saint-Géry du même département  ou à Belmont-sur-Rance, en Aveyron.

*Les abréviations en gras suivies d’un astérisque renvoient à la bibliographie du blog, accessible par le lien en haut de la colonne de droite.

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La devinette

Il vous faudra trouver le nom, en seul mot, d’un col lié au mot du jour, le gaulois bodica, précédé d’un adjectif.

La commune de France métropolitaine où il se situe porte le nom d’une variété d’arbre consacrée à une divinité.

Le nom de la commune nouvelle, chef lieu du canton qui porte son nom, est constitué d’un terme désignant un ensemble d’habitations complété, après une préposition, par celui de la rivière qui l’arrose.

Le nom du chef-lieu d’arrondissement rappelle que la montagne qui le surplombe était, elle aussi, l’objet d’un culte.

La région porte un nom issu de celui des Gaulois qui l’habitaient.

Le col est situé entre une commune au nom issu de celui d’un homme gaulois et une commune au nom relatif à des chaumières.

Indice :

indice 07 04 2024

Réponse attendue chez leveto@sfr.fr

15 commentaires sur “La bouzigue

  1. Dans le registre des Bouiges, pourrait-il y avoir eu parfois évolution vers Bouix ?

    Car je connais fort bien un lieu corrézien * où un hameau Bouix surplombe de quelques kilomètres par la route (quelques centaines de mètres à vol d’oiseau sur collines escarpées) un Pont des Bouyges. Certes, ce pont est nommé d’après les bouyges situées de part et d’autre, en fond de la vallée de la Luzège, prairies gagnées régulièrement sur la forêt et propices au pâturage des moutons (quand elles ne sont pas reboisées par déprise temporaire). Mais il n’est sans doute pas anodin qu’existe également non loin ce hameau « Bouix » : ne pourrait-il pas être de même origine ?

    ———————-

    * Vous savez, pas très loin de La bitarelle du gros Chastang, je crois [ha ha] en avoir déjà parlé ici. Encore plus près du Château de Ventadour, vous en avez vous-même parlé ici me semble-t-il.

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  2. Bonjour m Leveto

    voici ma liste de questions récentes :

    13  à saint-cannat : commanderie de LA BARGEMONE 

    —–

    10 SAINT-USAGE

    21 SAINT-USAGE   le même saint ?

    ———

    MOITRESSES  ?

    54  eulmont château des FRANCHES MOITRESSES

    88   saint-dié-des-vosges , quartier des MOITRESSES

    54  à vitrey  : MESSIPIERRE   statue de Saint-PIERRE

         messi  ?   édifié par PIERRE gérard

    messi  :   messie ?

                   missié ?

    54  LA NAGOULE

    54  PIROUé  ; à Dommartin-sur-amance

    57  azoudange , ROMECOURT

    63 la godivelle ;   les PREUMERIES HAUTES

    Les TRAS  ( BURONS )

    71  le MONT SAINT-ROMAIN  – à blanot –

    —-

    71  Bissy-la-mâconnaise , hameau de CHARCUBLE

          cercueil , sarcophage  ( charcophage )

    88  JAINVILLOTTE   1  Gethani  germanique

                                       2 Gaetanus ( latin )

    88   POMPIERRE  pont de pierre sur le mouzon

    93   STAINS   ; au choix !

      1  sittin ( francique )

       2 stagna ( étang)

       3 sexlius ( propriétaire latin )

    95   à béthemont : ferme de MONTAUGLAND

           1 mont haut ? montus altus

            ou

           2 origine germanique ( car en région d’Oil , et béthemont : germanique Betto )

    Merci , bonne journée.

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  3. Jacques C

    Les toponymes du type Bouix, Bouis ou Buis sont tous (sauf exception que je n’ai pas dénichée) issus du latin buxus, donnant bouis en occitan (et les variantes bouisse, boueis, bouais, bouich, bouch et buich).

    À Lamazière-Basse (Corr.), le lieu-dit Bouix était noté Boueix sur la carte d’état-major (fin XIXè siècle, avec un x final pour noter le pluriel en Auvergne), Bouix sur le cadastre napoléonien (établi entre 1808 et 1849 pour la Corrèze) et Boy sur la carte de Cassini (feuillet 14, Mauriac, 1783), sans doute par attraction du français « bois ». Notons au passage que la carte Michelin des années 1950 donne la graphie Boneix, sans doute parce que le u a été pris pour un n.

    Sur la carte IGN moderne et celle de 1950, le Pont des Bouyges doit son nom au hameau Les Bouygues (sic) situé au sud.

    Ledit pont n’est pas mentionné (n’existait pas ?) sur les cartes antérieures. En revanche, pour le lieu-dit, on trouve écrit Les Bouyges sur la carte d’état-major et sur le cadastre napoléonien mais Les Bouiges sur la carte de Cassini.

    Il aurait été extraordinaire qu’un même gaulois *bodica ait abouti à Bouyges d’un côté et à Bouix de l’autre, à moins de 2 km de distance.

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  4. Merci pour cette réponse fouillée et précise !

    Il y a donc une amusante coïncidence phonétique. Pour être honnête, je ne l’avais même pas remarquée jusqu’à hier soir, alors même que j’ai longtemps habité un sous-hameau de Bouix et que j’ai traversé plusieurs milliers de fois * le pont des Bouyges. J’ai juste pensé hier à « Bouix » en vous lisant et… pris conscience qu’il y avait des « bouyges » non loin.

    ——–

    * Sept ans d’études secondaires, à raison de deux fois par jour, 5 jours par semaine, 36 semaines par an : les 2500 fois sont dépassées. Ajoutons les allers-retours pour activités sportives, courses du week-end et sorties diverses, les 3000 sont en fait pulvérisées. Pfiou, étrange retour mental.

    ——-

    Incidemment, je peux conseiller à toute personne qui voudrait admirer le paysage de la vallée de la Luzège et du château de Ventadour (territoire sauvage et grandiose) de se rendre au pont des Bouyges, surtout s’il y a du brouillard. Rien ne vaut le pont des Bouyges nappé de brouillard, laissant émerger de façon onirique des langues de prairies de bas-fond, des bordures abruptes de hêtres (certains grandioses), châtaigners, chênes, bouleaux et pins sylvestres, des escarpements rocheux, puis au loin la silouhette inquiétante des ruines du château posées sur un piton abrupte. Ajoutez, à l’automne, les livrées spectaculaires des hêtres et des châtaigners ainsi que le froid silencieux du petit matin, et vous vous croiriez dans un conte.

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  5. Bousigue(s), dont une Bouzigue Bieille, c’est-à-dire « vieille», à Sautel (Ariège), des Bouzigues Médiocres et des Bouzigues Doulentes

    bonjour m Leveto

    je crois que vous pouvez remplacer les Z par un S .

    Bonne soirée.

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  6. echogradient73

    ■13  à saint-cannat : commanderie de LA BARGEMONE 

    Féminin de Bargemon, nom d’une commune varoise qui était vallis Barjamonis au XIè siècle, soit le diminutif roman du nom de Bargème (même département) qui était Bergemulu en 814 et Bargema en 1026-66, du gaulois barro-, « sommet » et gaulois gemelo, « lien ».

    —–

    ■10 SAINT-USAGE

    21 SAINT-USAGE   le même saint ?

    La commune de l’Aube était S. Eusebius en 1121 et la commune de Côte-d’Or était eccl. S. Eusebii en 1110-1111. Dans les deux cas, il s’agit d’une référence au gréco-latin Eusébius, pape du IVè siècle (Eusèbe).

    ———

    MOITRESSES  ?

    ♦ 54  eulmont château des FRANCHES MOITRESSES

    ♦ 88   saint-dié-des-vosges , quartier des MOITRESSES

    En Lorraine, une moitresse (variante du vieux français moiteresse, « vigne dont la récolte appartient moitié au propriétaire, moitié au fermier) était une métairie. (Dictionnaire de Godefroy)

    ■ 54  à vitrey  : MESSIPIERRE   statue de Saint-PIERRE

         messi  ?   édifié par PIERRE gérard

    messi  :   messie ?

                   missié ?

    «  Financée par un certain Pierre Gérard de Vitrey, cette croix porte le nom de Messipierre en l’honneur de Saint-Pierre, figuré en statuette sur le fût cannelé ».

    Messi, ancien français pour « Messire » , « titre qui était réservé aux seigneurs de la plus haute noblesse «  (Godefroy)

    ■ 54  LA NAGOULE

    —Il s’agit d’un lieu-dit de Bouxières-aux-Chênes dont on ne dispose d’aucune forme ancienne du nom. Sa signification est un mystère.

    ■ 54  PIROUÉ; à Dommartin-sur-Amance

    Le Dictionnaire topographique mentionne un moulin de Pirouel à Dommartin-sous-Amance. On trouve aussi un écart et une fontaine de Piroué à Moyen.

    Le nom du moulin pourrait être issu de pirouelle, « toton, toupie » (sur la même base pir– que « pirouette ») qui, par métonymie désignerait le moulin par sa roue.

    ■ 57  54 azoudange , ROMECOURT

    Attesté Romuicort cum ecclesia1152 et Kinthausen1564

    Le nom est attesté Romaninga en 1142, Romuicort ou Romaicort en1152, Kinthaus en 1564, Kindhaus en 1584, Romecourt en 1793 et enfin Römerhof en 1915-18 et 1940-44.

    Le nom initial, suffixé en ingen, provient d’un nom d’homme germanique, peut-être Hrotmus (à l’origine du nom de Romange dans le Jura). Le suffixe a été ensuite remplacé par le latin cortem, « domaine ». Le nom a ensuite été changé en Kinthaus, «  maison de l’Enfant », du nom du bâtisseur du château en 1564, un certain Michel de l’Enfant. Enfin, durant les deux guerres , le nom a été traduit Rômerhof, « la ferme de Römer », ce dernier patronyme désignant le pèlerin qui est allé à Rome, traduction du latin Romaeus

    ■ 63 la godivelle ;  

    ♦ les PREUMERIES HAUTES

    Ce nom n’apparaît pas sur les cartes avant la carte IGN moderne et est bien mystérieux. Il semble qu’il y ait eu là un buron.

    Le Godefroy cite une variante preume de l’ancien français proisme au sens de « proche, prochain », mais Les Preumeries portent semble-t-il un nom récent.

    Ce nom pourrait n’être qu’une fantaisie pour parler des « premiers » installés là : « première » se dit pruméira en auvergnat qui a pu être francisé en « prumerie » …

    On pourrait également envisager une corruption de *prunerie, « plantation de pruniers ».

    Les TRAS  ( BURONS )

    ♦ Tra :  Habitat temporaire des estives, antérieur à la construction des burons et dont il ne reste aujourd’hui dans les paysages que des alignements de trous semblables à de petits cratères d’explosion. Apparus dès le XVè siècle, il s’agissait de petites cavités creusées à flanc de montagne par les bergers et couvertes de toitures végétales, pour en faire des habitats saisonniers, ancêtres des burons.

    ♦ Buron : « Chalet, laiterie, cabane où l’on fait le beurre et le fromage, en Rouergue et en Auvergne » (Trésor du Félibrige)

    ■ 71  le MONT SAINT-ROMAIN  – à blanot –

    Le nom fait référence à un oratoire bâti à son sommet et mentionné ecclesia sancti romani en 927.

    Saint Romain, du latin Romanus, est le nom de deux martyrs (le premier à Rome en 258, le second à bagdad en 580), d’un confesseur de Blaye au IVè siècle, d’un abbé du Jura au Vè siècle et d’un évêque de Rouen au VIIè siècle.

    Deux communes portent le nom de Saint-Romain en S.-et-L : St-R.-sous-Gourdon et St-R.-sous-Versigny, mais je n’ai pas pu déterminer de quel Romanus il s’agit.

    —-

    ■ 71  Bissy-la-mâconnaise , hameau de CHARCUBLE

          cercueil , sarcophage  ( charcophage )

    Attesté Chercuble sur la carte de Cassini (feuillet 85, Chalon-sur-Saône, 1759).

    Gérard Taverdet voit en effet dans ce nom une corruption de « cercueil ».

    Cf. le § intitulé « Une première brèche », page 2 de ce document :

    https://www.unizd.hr/Portals/43/broj_1_2007/Gerard_Taverdet_Un_tabou_etymologique_Le_f_en_gaulois.pdf

    ■ 88  JAINVILLOTTE   1  Gethani  germanique

                                       2 Gaetanus ( latin )

    Attesté Gedanis villa en 877, Janiville en 1080 et Joinvilette en 1288, du nom de femme germanique Gatani ou d’homme germanique Gatinus et latin villa, « domaine » + suffixe diminutif.

    ■ 88   POMPIERRE  pont de pierre sur le mouzon

    Attesté Pontem petreum au VIè siècle, soit le « pont de pierre », en effet, comme son homonyme du Doubs (Pontepetra au XIVè siècle).

    ■ 93   STAINS   ; au choix !

      1  sittin ( francique )

       2 stagna ( étang)

       3 sexlius ( propriétaire latin )

    Au XIIIè siècle, Stains était Stagna, « les étangs », ce que paraît justifier la topographie ancienne. Mais en 1240 on trouve Setenis, dans lequel on reconnaît le nom d’homme germanique Sittin. Difficile de savoir si le nom Stagna est une simple corruption de Setenis (par attraction paronymique) ou bien s’il a été donné en remplacement de ce dernier …

    ■ 95   à béthemont : ferme de MONTAUGLAND

           1 mont haut ? montus altus

            ou

           2 origine germanique ( car en région d’Oil , et béthemont : germanique Betto )

    En trois mots :Mont au Gland chez Cassini (feuillet 1, Paris, 1756) et Mt au Gland sur la carte d’état-major (fin XIXè siècle) : probablement un endroit où on pratiquait la glandée.

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  7. pour Stains , Sittin me fait penser à SITTAFORD

    ( roman d’agatha Christie , que je suis en train de lire ; nom fictif , le gué de Sitta ? )

    The Sittaford Mystery ; comme très souvent mal traduit en  » Cinq-Heures vingt-cinq )

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  8. echogradient73

    L’origine la plus probable du nom de Sittaford (et des variantes Sitford, Setford, Satteford …) est le vieil anglais *set, « lieu de résidence, logement, endroit où sont détenus les animaux » , du pré-indo-européen *sed, « s’asseoir, rester assis … » d’où « mettre ou rester en place » , suivi de ford, « gué ».

    En gros, il s’agissait du gué du village ou de l’étable.

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  9. Vous avez raison, echogradient72, Bougeailles doit bien son nom à bodica, accompagné du suffixe –aille (latin –alia), comme la commune Boujailles du Doubs, signalée dans le billet.

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