Le vicus ( première partie )

lampyre
Lampyre romain

Dans la civilisation romaine de la colonisation, le vicus a désigné le village gaulois, distingué du municipium, village de citoyens romains, et de la colonia, village de colons. Le terme s’est maintenu jusqu’au haut Moyen Âge pour désigner un gros village. Il a par la suite été balayé par l’extension urbaine de la villa, d’abord simple domaine rural puis à l’origine du village. Si civitas, la ville en tant que corps politique, qui a subi la même exclusion,  s’est maintenu dans la langue en donnant « cité » tout comme le municipium est à l’origine de « municipalité », le vicus a quant à lui totalement disparu. Il n’en reste qu’un vestige en gascon où vic désigne une subdivision territoriale : le Vic Nau de la commune de Garlin ( P.-A.) représentant le « vic neuf » opposé au « vic vieux », le Vic Bilh ( Vicus Vetelus au Xè siècle ) qui s’étend au sud.

vic bilh

La représentation de vic est donc aujourd’hui purement toponymique. Le nombre relativement important de communes portant ce nom ou un de ses dérivés montre que ce terme désignait, au cours du haut Moyen Âge, une agglomération de quelque importance. Il serait fastidieux de toutes les citer, aussi ne donnerai-je que quelques exemples permettant de définir différentes formations :

■ nom simple avec ou sans déterminant :

  • Vic ( Ariège, de Vico en 1195), V.-sur-Aisne (Aisne), V.-de-Bigorre ( H.-Pyr.), V.-Fezensac ( Gers, Vic en 1127 ), V.-la-Gardiole ( Hér.), etc. ;
  • Vico ( Corse-du-Sud ) ;
  • Vicq ( Allier, Dordogne, H.-Marne, Nord, Yv. ), Vicq-d’Auribat ( Landes avec valle aurea, « vallée dorée » ), V.-sur-Breuilh (H.-Vienne), V.-Exemplet ( Indre, Vici Exampletum en 1327, de l’ancien français essampler, « agrandir », et, par extension « défricher » ), V.-sur-Gartempe ( Vienne), etc. ;
  • Vif (Isère, Vicus au XIè siècle) ;
  • Vis-en-Artois ( P.-de-C., Vico en 1098 ) ;
  • Vitz-sur-Authie (Somme) ;
  • Vix ( C.-d’Or, Vendée ).
  • Vy-lès-Filain, Vy-lès-Lure, Vy-les-Rupt ( H.-Saône ), etc.
  • Vyt-lès-Belvoir ( Doubs ) ;

■ diminutif viculus : Viel-St-Remy ( Ardennes, Vici S. Remigii en 1241 ), Vieu-en-Valromay ( Ain, Vyu en 1267), Vieu-d’Izenave (  Ain, de Vico en 1185 ), Vieux Viel ( I.-et-V., Veteri Vicello au XVè s.) ;

■ avec le suffixe locatif gaulois –iaco : Vichy ( Allier, Viciacus au VIIIè siècle ), Vissac ( H.-Loire, Viziaco vers 900 ) et Vichel ( P.de-D., Vichey en 1630) ; mais ces trois noms pourraient aussi être issus de noms d’hommes latins Vippius ou Vicarius suivis du suffixe –acum et je me garderai bien de trancher.

■ nom composé avec ou sans déterminant :

  • avec un nom d’homme :  Viabon ( E.-et-L., du germanique Abbo ) ;
  • avec une épithète : Viâpres-le-Grand et Viâpres-le-Petit ( Aube, vicus asper, « le rude » ), Vieuxvicq (E.-et-L., Vetus vicus en 1041, « vieux »), Vieuvy (May., id.), Vieux-Vy-sur-Couesnon ( I.-et-V., id.), etc., Viffort (  Aisne, latin fortis ), Longvic ( C.-d’Or ), Longwy ( Jura, M.-et-M.), Moyenvic ( Mos.), Crévic ( M.-et-M., Curvico en 950, avec le latin curvus, « courbe »), Viplaix ( Allier, Vipleis en 1327  puis Vicus Plexus en 1422, du participe passé plexus, « plié », pour décrire une agglomération en arc de cercle – à moins qu’il ne faille voir dans le -pleis du premier nom une altération de plessis, « enclos fait de branches entrelacées », qui sera mal interprété pour donner plexus )  etc.  ViplaixLes composés de loin les plus nombreux de ce type sont formés avec « neuf » comme Vigneux-sur-Seine ( Ess., Vicus Novus au VIè  s., avec attraction tardive de « vigne »),  Vinneuf ( Yonne, avec attraction de « vin neuf »),  Neuvic ( Corrèze, Dord., Vienne, Char. ), Neuvy ( Allier, L.-et-C., Marne, etc.), Nevy-les-Dole ( Jura ), Nouic ( H.Vienne, novo vico sur une monnaie mérovingienne ), etc. Le nombre important de « nouveaux vicus » au haut Moyen Âge montre bien l’accroissement démographique de cette période à l’origine de nombreux défrichements et de nouveaux  établissements ruraux : il y avait alors plus d’agglomérations qu’aujourd’hui !
  • avec un nom de rivière : Blévy ( E.-et-L., Blesiae Vicus en 1125, sur la Blaise ), Vibraye ( Sarthe, Braio vico sur une monnaie mérovingienne puis Vibraium en 1092, sur la Braye ), Vienne-la-Ville et Vienne-le-Château ( Marne, Viasna en 1074 de vicus Axona, avec axona, ancien nom de l’Aisne ), Visseiche ( I.-et-V., sur la Seiche ), Vivonne (Vienne, Vicovedonense en 857, sur la Vonne ), Vicdessos (Ariège, avec l’ancien nom attesté en 1272 du ruisseau Sos  qui a pris aujourd’hui le nom du village ).
  • avec le nom de l’ancien village : Vimarcé ( May., de Vico Marciano au IXè s. puis Vimarcio en 1290 : de Marcius et –acum), Vimory ( Loiret, Vico Mauro en 1152 puis Vimoriacum en 1350, de Maurius et –acum ).

Mais ce n’est pas tout ! On sait que le latin vicus est à l’origine de vicinum qui désignait le voisinage, d’où « voisin » en français et de vicanus, épithète signifiant « du village ». Ces deux dérivés sont  à l’origine de différents toponymes qui seront vus dans un prochain billet.

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Devinettes

Il vous faudra trouver les noms de deux communes françaises dont l’étymologie, outre le vicus, évoque

1 – une terre brûlée :

indice b 09 02 20

et cet indice devrait sans doute suffire pour celle-ci ;

2 – un  « technicien de surface » :

 

 

et, comme c’est sans doute introuvable avec ce seul indice puisque ni le site officiel de la mairie ni la page wiki ne donnent cette étymologie mais préfèrent parler d’un prétendu carrefour, voici un indice sans doute plus efficace :

indice a 09 02 20

Réponses attendues chez leveto@sfr.fr

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