Mais pourquoi tant de hent ?

Après une longue balade à travers les voies de communication (I, II, III, IV), les sentes et les sentiers, les pistes, les bides basques, sans oublier les rues et les chaussées de Brunehaut (ouf !), je m’attaque aujourd’hui aux routes et chemins bretons.

Le breton hent  (à prononcer [εn(t)] en faisant rimer avec pinte), qui est de la même famille que la « sente »,  désigne la voie, le chemin, la route. Près de 200 toponymes sont formés avec ce terme (mais pourquoi tant de hent ?) dont plus de la moitié sont des Croaz Hent, c’est-à-dire des croisements (équivalents des Bidegurutzea vus au Pays Basque). Ces noms sont alors souvent complétés par celui d’une localité comme Croaz Hent Loctudy à Riec-sur-Belon (Fin.) ou par un complément comme Croaz Hent Coatanéa à Bourg-Blanc (id.), « carrefour du bois (coat) de la haie (an hea) », Croaz Hent Letiez à Saint-Éloy (id.), « carrefour des auberges (leti-ez) », Croaz Hent Ar Venec à Lanvellec (C.-d’A.), « carrefour pierreux (venec forme mutée de meneg) », Croaz Hent Huellan à Trévou-Tréguignac (C.-d’A.), « carrefour d’en haut », etc. Il conviendra toutefois de bien faire la distinction d’avec Hent ar Croaz, « chemin de croix, calvaire ».

CPAguingamp-pen-an-croas-hent

On trouve également des Beg an Hent, « le haut, le bout du chemin »,  Hent Meur, « grand chemin » désignant souvent une ancienne voie romaine, Hent Bihan, « petit chemin », Nevez Hent « nouveau chemin », Hent Koz « vieux chemin », Hent Kamm, « chemin tortueux », Milin an Hent (« moulin du chemin »), Hent Guer, « chemin vert », Hent an Iliz, « rue de l’église » … plus quelques Ar Pevar Hent, « les quatre chemins » et  Pemp Hent, « cinq chemins », dont un redondant Carrefour Pemp-Hent à Plougrescant (C.-d’A.) où les cinq voies ne sont donc pas parallèles, merci de le préciser, un Hent Meur Bihan à Ploumillau (id.) où le « grand chemin » est « petit  » (à moins que ce ne soit l’inverse, les Costarmoricains sont décidément des gens épatants).

Et je n’oublie bien entendu pas de citer l’île du golfe du Morbihan appelée Hent Tenn : c’est l’île du « chemin difficile » (DEIF* – j’en ai rêvé, je l’ai fait !).

Les « allées couvertes » pré-historiques sont appelées hent-korriganed, « sentier des korrigans », et ces derniers  apparaissent dans le Hent Dall Korriganed à Trégunc (Fin., hent dall, « chemin aveugle, cul-de-sac » – chemin où y a que dalle, donc).

Quelques variations hasardeuses de prononciation et, par là d’orthographe, ont donné des noms comme le Croissant à Guiscriff (Morb.), en breton Kroaz Hent,  le Croissant du Treff à Concarneau (Fin.), en breton Kroazhent an Trev, c’est-à-dire « carrefour de la trève, succursale de paroisse, d’où quartier », le Croissant Ty Naouët à Trégunc (Fin.), en breton Kroashent Ti Naoued, « carrefour des maisons en pente ou penchées », le Croissant-Bouillet, un village au carrefour de trois communes finistériennes dont le nom breton Kroaz Hend Bouilhed est pourtant clair : c’est le « croisement mousseux, boueux », et quelques autres du même acabit qui ne semblent pas plaire à tout le monde.

PS : je n’en ai pas fini avec les voies de communication ! Il me reste encore quelques petits mots d’usage local à explorer. Ce sera fait dans un prochain billet.

*Les abréviations en gras suivies d’un astérisque renvoient à la bibliographie du blog, accessible par le lien en haut de la colonne de droite.

point-d-interrogation-sur-le-clavier-nb10411

La devinette

Il vous faudra trouver un toponyme de France métropolitaine lié au mot du jour.

Le mot du jour entre ici en composition avec un autre mot, l’ensemble étant complété par un patronyme, lui-même étymologiquement composé de deux mots aujourd’hui soudés. Voilà donc un toponyme composé de quatre mots soudés deux par deux.

Cette forme de toponyme est très courante dans la région concernée mais est unique dans la commune qui accueille celui qui nous intéresse. L’orthographe française officielle (du moins celle du fichier FANTOIR) est, me semble-t-il, elle aussi unique.

■  un indice, pour la commune  :

indice a 01 04 2023

■  et un autre indice, pour le toponyme à trouver :

indice-b-01-04-2023

Et maintenant, en avant !

Réponse attendue chez leveto @sfr.fr

19 commentaires sur “Mais pourquoi tant de hent ?

  1. Bonjour M leveto

    après avoir lu une biographie de Madame de Montpensier , j’ai eu l’idée d’en chercher la toponymie ,
    à partir
    de certains noms DE NOBLIAUX cités dans sa vie .

    ——————————-

    MONTPENSIER 63 Mons pancherii ( de la Panse)

    ——————————
    ROCHECHOUART plusieurs étymos sur le net
    la principale :

    roca cavardus,- chouette ( comme les chouans )

    ———————

    MORTEMART = idem mare morte ?
    ———————————-
    LA REYNIE = raginhari ( conseil+ armée)

    ( 19 , à LOUIGNAC) les sarcophages de louinac
    ——-
    FLAMARENS 32 flamalingis en 1097 wisigoth
    voir aussi FLAMMERANS 21
    ————————————–
    MONTAUSIER ( ou montaussier) 16
    à BAIGNES-SAINTE-RADEGONDE

    Beania = 1 bec jaune ?
    2 étudiant nouveau ?
    Ou

    Bethania ( D&R)

    Ancien CATHMERIACUM
    ——————–
    37 CHATEAU LA VALLIERE ( vallis & castrum)

    —–
    TONNAY-charente 17

    —-
    CHALAIS 16 24 36 86
    Calès 24 46 82
    chaleix challex calesium

    *Kar , *Kal ?


    LUDRES 54

    ——————————-
    AUBIGNé 35 79 albiniacum ?

    du coup , je vois aussi AUBIGNé-RACAN = honorat de Bueil de Racan 1589 -1670

    ————————
    TARANNE
    variante TARENNE
    je trouve :
    le bois taranne à GAULT-PERCHE 41
    une CROIX-TARENNE 61 DAME-MARIE
    Rue Taranne, Paris
    tare , tarre = terre ?

    ——————
    après ma lecture de Ric Hochet ( le fantome de l’alchimiste ), histoire se passant à
    CORCHIEN-le-Manoir , je vois qu’il existe un vrai CORCHIEN , un

    hameau de
    GIROLLES 45

    l’étymologie toponymique , c’est sans fin , j’ai plein d’autres toponymes apparus lors de ma recherche
    ( pour lundi prochain )
    merci .

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  2. Bonsoir ,
    HENT , en breton signifie la 1erme maison de la nouvelle rue . (il me semble ) c’est écrit sur un Pilier d’une maison à Roscoff , face à l’église de Roscoff . Cette rue a été gagnée sur la mer , car l’Evêché de Saint Pol de Léon , voulait que les cérémonies religieuses se passent à la Cathédrale de Saint-Pol (l’an 1200), et saint-pol-de-léon avait 7 paroisses , qui avaient chacune une chapelle à l’intérieur , (c’est a dire…un autel ou les cérémonies avaient lieu ) …Les Corsaires ce sont offert la CHAPELLE DE ROSCOFF , qui toujours debout et toujours aussi belle . Quelques maisons existent toujours malgré leur âge …(1582)…(tête de rue ?)…
    Yvonne Prigent /Siohan.

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  3. Siohan

    Merci pour votre contribution et ce rappel historique concernant Roscoff.

    Le breton hent désigne, sans contestation possible, « la sente, le chemin, la rue » et en aucun cas « la maison « qu’elle soit la première de la rue ou pas.
    En revanche, les Bretons ayant pour habitude (tradition ? ) de donner un nom à leur maison, il en est qui choisissent de la nommer selon son emplacement. C’est ainsi qu’on trouve des noms comme War ribl an hent , « Sur le bord du chemin », E-penn an hent, « Au bout du chemin » ou encore E-tal an hent , « En face du chemin ».

    L’inscription que vous citez sur un pilier d’une maison de Roscoff devait marquer le début de la rue mais ne devait pas être le nom de la maison elle-même.
    À moins qu’il ne s’agisse d’une partie d’une inscription plus longue aujourd’hui effacée qui correspondait peu ou prou à un des noms que je mentionne plus haut.

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  4. lecteur

    après avoir lu une biographie de Madame de Montpensier , j’ai eu l’idée d’en chercher la toponymie , à partir de certains noms DE NOBLIAUX cités dans sa vie .
    Vous lisez décidément beaucoup, ce qui me ravit. Je ne peux que vous approuver, vous complimenter et vous conseiller de transmettre cette excellente habitude (de la manière qui vous plaira) au plus de gens possible ! Et, si je puis me permettre, ne jetez jamais un livre ! (si vraiment vous ne pouvez pas faire autrement, passez-les plutôt à votre voisin … ou à moi !)
    ——————————-
    MONTPENSIER 63 Mons pancherii ( de la Panse)

    ♦ Montpensier (P.-de-D.) :Mons Pantiarius en 993-1048, du latin *pantic-arius, « pansu » (Dauzat & Rostaing), d’où l’occitan *pansier , cf. le suivant (E. Nègre).

    ♦ Montpensier, commune de St-Georges-sur-Moulon (Cher ) : in Monte Pancerio au XIè siècle. Adjectif *pancier , « ventru » (sur pance , « ventre » avec suffixe ier). Le substantif ponsier , « individu ventru », est attesté (E. Nègre).
    ——————————
    ROCHECHOUART plusieurs étymos sur le net
    la principale : roca cavardus,- chouette ( comme les chouans )

    Rochechouart (H.-Vienne) est attesté Rocacoart en 1027, Rochechoart en 1049 et Rocam Cavardi en 1068 : du nord-occitan ròcha, « roche, château-fort » et nom de personne Chouart.
    Le patronyme Chouart ou Chouard pourrait être un dérivé de l’ancien français choer, « tromper, flatter », surnom donné à un personnage trompeur ou bien dérivé de choe, « chouette, chat-huant ».
    ———————
    MORTEMART = idem mare morte ?

    Mortemart (H.-Vienne) était de Mortemar en 1105, de l’occitan mòrta, « dormante », et mar, « mer », qui a pris le sens de mara, maro , « petit amas d’eau dormante ».
    ———————————-
    LA REYNIE = raginhari ( conseil+ armée)

    C’est bien ça : ragin, raginon , « conseiller » (la notion de « donneur de conseil » est bien présente, il s’agit d’une fonction, d’un « grade ») , et hari, « armée »

    ■ ( 19 , à LOUIGNAC) les sarcophages de louinac

    sans doute du nom d’homme latin Lutonius et suffixe acum
    ——-
    FLAMARENS 32 flamalingis en 1097 wisigoth

    attestéde Flamalingis en 1097 et Flamarenxs en 1289, du nom de personne germanique Filemarus et suffixe ingos

    ■ voir aussi FLAMMERANS 21

    attesté Flameranz en 1228 et Flamerens en 1239, du nom de personne germanique Flatalar et suffixe ingos
    ————————————–
    MONTAUSIER ( ou montaussier) 16

    Il s’agit peut-être une variante d’eusière , « chênaie verte » (sur euse, « chêne vert »). Des toponymes en Ausière(s) ou Auzière(s> sont attestés en pays de langue d’oc (Vauc, Gard, Hér.), mais le masculin fait ici difficulté.
    Si le nom attesté Montaussier chez Cassini semble infirmer cette hypothèse, on sait malgré tout que les noms portés sur les cartes de Cassini ne sont pas toujours rigoureusement exacts. Dans le cas présent, il s’agit d’ailleurs de la seule attestation du nom avec deux s.

    Enfin, Ausier, substantif masculin, est donné pour « aigle pêcheur » dans le Dictionnaire du moyen français (1330-1500) https://www.cnrtl.fr/definition/dmf/ausier
    Mais peut-on imaginer un tel rapace sur ce mont ? À moins qu’il ne s’agisse d’un patronyme, celui-ci étant par ailleurs attesté. Nous serions alors ici en présence d’un « mont » appartenant à un certain Ausier (les toponymes ainsi formés sont très nombreux).

    ■ à BAIGNES-SAINTE-RADEGONDE
    Beania = 1 bec jaune ?
    2 étudiant nouveau ?
    Ou
    Bethania ( D&R)

    Beania en 1068. L’hypothèse de l’importation du nom de Béthanie est la plus probable. On en compte une douzaine en France, plus des Béhaine et Bithaine.
    Ancien CATHMERIACUM
    ——————–
    ■ 37 CHATEAU LA VALLIERE ( vallis & castrum)

    Attesté simplement Castelli en 978. A été érigé en duché pour Madame de La Vaillère, d’où son nom .
    —–
    TONNAY-charente 17

    Attesté Taunay en 1242, du nom d’homme gaulois Talenus et suffixe acum
    —-
    CHALAIS 16 24 36 86
    Calès 24 46 82
    chaleix challex calesium
    *Kar , *Kal ?

    Chalais (Char) est attesté Chaleis en 1214 ; Chalais (Indre) est attesté de Chaleo en 1648 ; Chalais (Vienne) est attesté Chaleys en 1285.
    Tous formés en effet sur le pré-celtique *kal, « pierre, rocher » et suffixe pré-celtique es(um) ou latin ensem pour désigner un « endroit pierreux ».

    LUDRES 54

    Attesté Lusde vers 1070 et Lude en 1127-58, du latin lucidus, « clair » pour désigner une « clairière » (Dauzat et Rostaing ) ou du nom d’homme latin Lucidus et attraction de l’oïl loutre, lutre (E. Nègre).
    ——————————-
    AUBIGNé 35 79 albiniacum ?

    Effectivement les toponymes Aubigné sont sans surprise issus du nom d’homme latin Albinius et suffixe acum
    du coup , je vois aussi AUBIGNé-RACAN = honorat de Bueil de Racan 1589 -1670
    En effet, Aubigné (Sarthe) a obtenu le droit en 1964 de s’appeler Aubigné-Racan , en tant que lieu de naissance dudit Racan au château de Champmarin qui subsiste comme manoir et s’accompagne d’un musée Racan.
    ————————
    TARANNE
    variante TARENNE
    je trouve :
    le bois taranne à GAULT-PERCHE 41
    une CROIX-TARENNE 61 DAME-MARIE
    Rue Taranne, Paris
    tare , tarre = terre ?

    L’ex rue Taranne à Paris , baptisée rue Tarennes en 1418, devait son nom à Simon de Tarrennes, échevin à Paris en 1417, sous la prévôté de Guillaume Cirasse.
    Tarenne, Terrene et Taraine sont les anciens noms du Ternin, affluent droit de l’Arroux à Autun (S.-et-L.) dont le cours supérieur continue d’être appelé La Tarène. Il s’agit d’un hydronyme formé sur la racine pré-celtique tar (celle du Tarn) accompagnée du suffixe gaulois enna. La même rivière est appelée Tarane en 1270, du même *tar suivi du suffixe latin anum. Cet hydronyme a pu devenir le nom d’une terre, d’un domaine puis devenir le patronyme de son propriétaire.
    Le patronyme Tarenne est bien attesté et a donné à son tour son lot de toponymes comme par exemple une maison dite La Tarenne à Barou-en-Auge (Calv.). Le patronyme Taranne est une variante du même nom (cf. la rivière)
    ——————
    après ma lecture de Ric Hochet ( le fantome de l’alchimiste ), histoire se passant à
    CORCHIEN-le-Manoir , je vois qu’il existe un vrai CORCHIEN ,

    Dans le Dictionnaire topographique du département de la Nièvre (Georges de Soultrait, 1865) on trouve un hameau L’Écorchien sur la commune de Lormes appelé Lacorchien en 1701 et Corchechien en 1779. Ne me demandez pas ce qu’on y faisait, mon serment de Bourgelat m’interdit même d’y penser.
    Pour le Corchien du Loiret, Jacques Soyer ( Les noms de lieux du Loiret , éd. Horvarth, 1979) émet l’hypothèse (sans citer de formes anciennes) d’un domaine (latin cortem) d’un nommé Le Chien ou Lechien . Bof …

    un hameau de
    GIROLLES 45

    ♦ Girolles (Loiret) : sans attestation ancienne, difficile de se prononcer. Dauzat & Rostaing déclarent ce nom « obscur » et E. Nègre ose un pluriel de l’oïl girolle , « chanterelle » (alors que tout le monde sait que le b-a-ba du cueilleur de champignons est de ne surtout pas dévoiler ses lieux de récolte !)
    ♦ Girolles (Yonne) est attesté Garillae en 875 et Geroliae en 1143, peut-être du nom d’homme roman Garrulus (sous entendu terrae ).

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  5. Bonjour M leveto

    Je vois , sur un site que POILLY-LEZ-GIEN 45
    viendrait de Polliacum = chaussée ??

    J’en suis très surpris , car ce serait plutôt un pollius-iacum .
    qu’en est-il de ce polliacum = chaussée ?
    un des multiples avatars de l’absence de contrôle du Net ?

    Merci

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  6. Lecteur
    Vous avez raison d’être surpris !
    Poilly (Loiret) est attesté curtem Pauliacum en 836, du nom de personne roman Paullius et suffixe acum.
    Même étymologie pour Poilly sur Serein et Poilly sur Tholon dans l’Yonne.
    En revanche, Poilly dans la Marne, attesté Paviliacum en 850 est issu du nom de personne roman Pavilius et acum.

    Où donc avez-vous trouvé l’étymologie que vous signalez ?

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  7. @Leveto

    Je vois que le Lecteur, une fois de plus, ne sait plus où il a rangé sa fiche, celle consacrée à l’étymologie de Poilly-lez-Gien.
    Mary Poppins n’étant pas libre ce week-end, je me dévoue… et je farfouille vite fait pour dénicher l’attestation que vous réclamiez.
    -Coup d’bol, il suffit de se baisser pour ramasser.
    Par exemple :

    POILLY-LEZ-GIEN, toponyme, viendrait de Polliacum, c’est-à-dire chaussée qui, élevée à l’époque gallo-romaine, aurait protégé le village des crues de la Loire.

    Quel crédit désormais accorder à ce qui n’est possiblement qu’une false etymology? Pas davantage qu’à celle qui soutient que le nom du patelin viendrait d’une corruption de Paullius via Pollux-le-Ghien, nom d’homme de clébard à poil long.

    Les circonstances et l’importance du sujet méritent qu’on examine les choses d’un regard neuf tandis que nous sommes encore à Gien… à jeun :
    1. Une chaussée qui aurait « protégé le village des crues », chez moi, on appelle ça une digue (een dam)… et ma 4L Renault et moi, nous nous souvenons très bien du Plan Delta.

    2. La commune de Poilly-lez-Gien est-elle suffisamment à risques pour mériter une notice dédiée chez Wikipédia, une notice dédiée à l’étendue des dégâts envisageables ?… -Oui !

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Risque_d%27inondation_%C3%A0_Poilly-lez-Gien

    3. Existe-t-il, dans la microtoponymie attachée à cette localité en proie aux débordements, quelques traces relatives à une détermination d’avoir à protéger les gens et les biens ?… -Oui, si l’on se souvient qu’en patois ligérois une TURCIE désigne ce qu’on appelle aussi une LEVEE.
    Si l’on ne s’en souvient pas, on consultera le TLFi :

    TURCIE (subs.m) Région. (Pays de Loire). Digue élevée le long de la Loire et de quelques-uns de ses affluents pour garantir des crues subites auxquelles ils étaient sujets et aussi pour servir de routes le long du fleuve (d’apr. MARION Instit. 1923).

    4. Comme je n’imagine pas une seconde que Pouilly-lez-Gien ait pu se jumeler avec Ankara, Istamboul et Constantinople, j’avance l’idée d’une TURQUIE protectrice face aux aléas hydrauliques.
    La voici déclinée à 3 reprises :

    45254 Poilly-lez-Gien Loiret LA TURQUIE
    45254 Poilly-lez-Gien Loiret TURQUIE NORD
    45254 Poilly-lez-Gien Loiret TURQUIE SUD

    L’équivalence du C (de TurCie) et du QU (de TurQUie) ne rebutera pas ceux qui s’inondent la constitution au blanC (d’Alsace) sans préjudice de la blanQUette (de Limoux).
    ………
    Cette audacieuse contribution aura-t-elle l’heur de satisfaire l’inextinguible soif de savoir du Lecteur?… et de répondre à l’attente des spécialistes les plus fébriles ? – Rien n’est moins sûr !

    D’ici là, tout en compatissant avec le maire de Poilly-lez-Gien, une illustration sonore : -When the turquie breaks, babe you’ve got to move !… to Chicago (Illynoye) ou vers Saint-Véran (PACA d’altitude) ?

    @Brosseur

    L’autre jour, par malice sans doute, par salacité évidemment, vous aviez évoqué l’ambition de vous réincarner en tabouret de piano, soutenant le fessier de Tori Amos. J’avais déjà eu la même tentation avec la chaise de Sharon Shannon…
    Mais ça c’était avant… avant de rencontrer Anna Kristina, la lead singueuse de Zepparella, so perfect when she blows and swallows : -Very joli job au mouth organ !… dont il est bon de préciser, pour ce dernier, qu’il s’agit d’un modèle Hohner Special 20 en B flat.
    J’en conclus que vous et moi pourrions accéder au titre envié de Citoyens d’honneur de Poilly-lez-Gien, localité dont les administrés répondent au nom de POLISSONS et, leurs femelles, de POLISSONNES.
    _______________

    P.S 1 : Vérification faite, chez VVLT, les TURCIES furent déjà évoquées avec l’aveu de ne pas leur trouver la moindre retombée toponymique. C’était il y a six ans… en irait-il de même aujourd’hui ?

    P.S 2 : Cette affaire de niveau des eaux m’évoque une ville que j’ai bien connue. Elle mérite que je la célèbre sous la forme d’une easy riddle ( à suivre)

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  8. – De manière générale et altimétrique, les terres arables se situent au-dessus du niveau du lit de la rivière qui les traverse. C’est la sagesse même : il serait inconvenant que l’étiage soit constaté un étage plus haut que la parcelle en culture. Et pourtant… !

    – De manière habituelle, on constate les effets de l’antonomase sur les breuvages. Ainsi coulent en nos gosiers à jamais inétanchés, le cognac, le tavel, le rivesaltes, le xérès, le beaujolais, le saumur, le juliénas, le curaçao, le calva’… etc.

    – Beaucoup plus rares sont les cités que l’on surnomme d’après un toponyme, genre Bruges et Martigues, respectivement la Venise du Nord et la Venise Provençale.

    – Rarissimes, enfin, sont les endroits où l’on assiste à une explosion du concept de confluent… avec un « carrefour de 4 cours d’eau » dont chacun d’eux porte le nom des 3 autres avec un qualificatif différent permettant de le distinguer… un peu comme on dirait « un déterminant » dans la grammaire propre à VVLT.

    Résumons-nous :

    1. Avec une majuscule et en 8 lettres, cette localité tient son nom d’une rivière aménagée. On peut y voir, de nos jours et hors ses murs, comment un cours d’eau peut surplomber de quelques mètres les parcelles agricoles. C’est-à-dire le principe inverse d’une turcie.

    2. Sans majuscule, elle désigne un breuvage apprécié des connaisseurs mais parfaitement inconnu des tenanciers de rades pacaïens : – Je le sais, j’ai tenté l’expérience ! Et pourtant, dissimulée sous un autre nom, la boisson était tout à fait disponible.

    3. Le surnom donné à cette ville est formé d’après une autre ville, située dans le Proche-Orient et avec qualificatif de couleur, une couleur imputable à l’atmosphère… un truc du genre la Jérusalem parme, la Mecque orange brûlée ou la Damas gorge-de-pigeon. Ce qui, dans ce dernier cas, viendrait en contradiction avec le Damascène des colombiers, notoirement inéquipé d’une gorge moirée :

    Un indice ?… à la façon de Leveto qui m’a récemment berné avec sa PRAIRIE originelle et virginale devenue un CAMP à Guingamp ?…
    -OK, on l’aura voulu : – Dans cette localité persistent à exister les plus vieilles ruines (remarquables et constatables) de toute la province, celles d’un château…
    Par humidité humilité sans doute et au vernaculaire, on les désigne désormais de cette façon : La Maison de la Rivière.

    -That’s all, dudes !
    ____________

    -Est-ce que les Histoires d’eau finissent mal… en général et en déboires ?
    Faut voir avec Godard et Truffaut…. le temps d’un road movie délicieusement bavard et littéraire :

    Mais il ne s’agit pas là d’un indice !

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  9. Petit retour imposé pour le « régional de l’étape ». J’étais très occupé cette semaine, n’ai découvert l’énigme que mardi soir, et n’avais pas encore eu le temps de réagir au billet lui-même. Mais, galvanisé par l’écoute de cette version féminine des Zepellin, je me mets au boulot (bien que troublé par l’enchaînement dans une vidéo unique de trois fois le même enregistrement en boucle).

    Or donc.

    Pour autant que je sache, le Breton aime placer l’adjectif après le nom qu’il qualifie, ce qui fait que la forme Hent Koz est régulière et confortable à l’oreille, tandis que Nevez Hent surprend un peu là où l’on attendrait plutôt Hent Nevez. Mais de fait, l’usage est là, la toponymie nous démontre que l’inversion existe.

    Lorsqu’il n’y a aucun doute sur le couple nom-adjectif, peu importe si les habitants s’amusent à les intervertir. Hent Nevez ou Nevez Hent, c’est blanc bonnet ou bonnet blanc. Mais que faire lorsque le toponyme articule deux substantifs dans une forme surprenante ? Ainsi, Milin an Hent signifie « Moulin du chemin », comme l’a bien noté notre hôte, mais nous aurions plutôt attendu un « Chemin du moulin » ! C’est en général la présence d’un moulin qui permet de caractériser un chemin parmi tant d’autres, et non pas la présence d’un chemin qui singularise un moulin (tout moulin se doit d’être accessible pour remplir sa fonction, et dispose donc a-priori d’un chemin).

    Mais leveto, en toponymiste soigneux, n’est pas tombé dans le piège. Il a certainement constaté que ce toponyme comporte la forme Milin et non pas la forme Vilin. Il ne s’agit donc pas d’un complément placé en amont du nom qu’il précise, mais bien d’un sujet.

    Car le breton est une langue plus claire que le français. Comme l’allemand ou bien d’autres langues, elle décline différents cas. Ce qui est original, c’est qu’elle ne le fait pas par des changement de terminaison, comme en latin. Pas non plus par la déclinaison de la forme des articles, comme en allemand. La langue bretonne comporte une singularité amusante : elle décline ses cas par la mutation de la première lettre des mots concernés.
    Ainsi, Ar milin au nominatif ou à l’accusatif devient Ar vilin au génitif. Ar mor au nominatif ou à l’accusatif devient Ar vor au génitif. Ce qui fait que dans la magnifique chanson Me zo ganet e kreiz ar mor, le poète commence le premier couplet en expliquant qu’il est né au milieu de la mer (« ar mor » = accusatif, même si la forme grammaticale est ici complexe), puis précise en fin du même couplet qu’il est donc né dans le pays de l’Armor… « e bro ar vor » (« ar vor » = génitif).
    De même, le pays de l’intérieur Ar goat (littéralement « le bois ») devient au génitif Ar c’hoat dans le nom de la formidable (et très physique) danse Kost Ar C’hoat.

    Il n’y a donc pas de doute, malgré l’incongruité de la tournure. La belle fête qui se tient au moulin de Craca à Plouézec sous le nom de Noz ar Vilin est la « Nuit du moulin ». La voie qui s’appelle Milin an Hent est en revanche bien le « Moulin du chemin ». Étonnant, mais indiscutable. L’absence de mutation du M en V n’autorise aucune discussion.

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  10. TRS

    Je me suis lancé par deux fois dans la résolution de votre énigme, mais aucune des pistes que j’ai explorées ne m’a permis d’y voir clair.

    Il est temps de me lancer dans la rédaction de la répàmadev et du billet du dimanche.

    En conséquence, je suis au regret de vous dire que je passe mon tour…

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  11. Leveto

    C’est sans doute que vous n’avez pas assez « creusé votre sillon » :


    NDLR :
    – L’expression « creuser son sillon » signifie « montrer de l’opiniâtreté, de la persévérance dans une tâche quelconque à accomplir »…
    – L’image proposée, en sa rigueur anatomique, n’est rien d’autre qu’un marchepied utile à qui souhaiterait prendre la pose sur l’une ou l’autre des marches du podium.

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  12. Sans vouloir mettre la pression à TRS, il ne nous a toujours pas livré la réponse à sa devinette de lundi dernier (ci-dessus).

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  13. Afin de complaire à Jacques C.

    Autoportrait, au moral et au physique, d’un septuagénaire
    ou, titre alternatif et « façon Siècle d’or »:
    « Tronie sur écran plat d’un Machincourtois »
    ………
    Cet homme, que les années n’ont pas épargné, se mire maintenant en sa salle d’eau : – C’est là son cérémonial du matin, histoire pour lui de se mettre en train.
    Las, le spectacle chaque fois renvoyé ne le met pas de quiète humeur : sur un front déjà buriné par les ans et les tâches ménagères, le soc du temps, imperturbable et mené par la « valeur travail », continue son ouvrage. Sa peau de Bébé Cadum, autrefois appréciée des dames et de sa maman, n’est plus qu’un champ de ruines de rides.

    Il tente de montrer quelque optimisme :-Peut-être n’est-il pas si sûr qu’un jour ces sillons virent à la scissure ?

    Il invoque la cosmétologie : -How can I get rid of these rides wrinkles ?

    Au final, et comme toujours, il se rassérène grâce à certaine recette, transmise de bouche à goulot, collectée aux plus salubres estaminets du 59 et du Benelux réunis :

    Foin de la nostalgie !… Si les rides te rendent chèvre
    Songe à bien t’humecter d’un fort violent genièvre.
    Un soin, parait-il, que la diététique condamne ?…
    No problèm’ !… quand tu disposes d’assez de schiedam

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  14. EXPLICATION DE TEXTE

    Le nom du breuvage à retrouver, peu alambiqué mais violemment antonomasé, était donc le SCHIEDAM, attesté sans majuscule dans la plupart des dictionnaires honnêtes :

    SCHIEDAM, subst. masc.
    Eau-de-vie de genièvre fabriquée en Hollande et dans la Flandre belge et française.
    Un bon souper (…) et un verre de schiedam par-dessus (DUMAS père, Envers conspir., 1860, I, 1, p. 144
    − P. méton. Verre ou bouteille de schiedam; son contenu. Boire, commander un schiedam.
    J’ai donc reçu d’Amsterdam un panier ou deux de schiedam (VERLAINE, Œuvres compl., t. 3, Invect., 1896, p. 389).

    La ville de SCHIEDAM tient son nom de la rivière SCHIE et du suffixe DAM, la digue.
    Cette SCHIE, par malice, s’écartèle en 4 tronçons, chacun d’eux étant affecté d’un « déterminant » à haute valeur toponymique ajoutée :
    1 Delftse Schie
    2 Schiedamse Schie
    3 Delfshavense Schie
    4 Rotterdamse Schie

    « De nos jours, les eaux de la Schie dominent les champs de quelques mètres. En 1903, à la suite d’une rupture de la digue à Kandelaar, la Schie s’est pratiquement vidée ».

    La ville de Schiedam est surnommée, au nuancier, la « ZWART NAZARETH », la « Nazareth noire » :

    The concept for Zwart Nazareth was born by combining the company’s aged jenevers and the former town’s nickname Zwart Nazareth (Black Nazareth) into a super premium dark spirit. In the 19th century Schiedam was called Zwart Nazareth. The downside of being the Jenever capital was a black charred and heavily polluted city.

    Soit, en français de France :

    Le XVIIIe siècle fut l’âge d’or de Schiedam, lorsque l’industrie du spiritueux se développa avec succès. La stagnation des importations de boissons de France (en raison des conflits et du Petit Âge glaciaire) rend possible l’émergence de la distillerie de genièvre à Schiedam. D’une douzaine d’ateliers de torréfaction et de distilleries le genièvre de Schiedam était fabriqué et exporté à travers le monde. Cette industrie, en raison des fumées et de la suie adhérant aux façades et pignons, donna à la ville son surnom de Nazareth Noire.

    _______
    La ruine dont s’enorgueillit Schiedam ?… Il suffisait de savoir qu’au sens premier, chez les Bataves, le terme HUIS désigne une simple maison d’habitation. Les plus curieux d’antiquités taperont HUIS TE RIVIERE sur la barre à Doc.
    Mais il est cependant des HUIS classieuses et le Mauritshuis (de Den Haag), bien des fois, m’a ouvert ses portes.

    L’indice anatomique ?… La scissure dite aussi Sillon de Sylvius ?

    Il fallait voir du côté de Franciscus de le Boë, dit aussi Sylvius, anatomiste, physiologiste et médecin néerlandais (1614-1672).
    Il passe pour avoir été celui qui découvrit tous les secrets de la concoction des ingrédients propres à l’obtention d’un jenever de qualité. Une sorte de « Dom Pérignon » batave… réfractaire aux bulles mais soucieux de violence alcométrique : un saint homme en somme !
    _____________

    NDLR :
    Une sorte d’allusion subliminale se nichait dans la voix off d’Une histoire d’eau, vers les 6 :40 :

    Les soleils mouillés de ces ciels brouillés, pour mon esprit, ont les charmes si mystérieux de tes traitres yeux brillant à travers leurs larmes.
    -Après ça, que dire ?
    -Rien. Tais-toi…

    C’était pour situer le paysage, là où tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté… C’est-à-dire en Batavie… -Ah, les ciels de Ruysdael !

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  15. Merci pour toutes ces explications — et ce voyage.

    Je n’avais pas bien écouté l’oracle et je cherchais bêtement en France, damnit.

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  16. TRS

    Comme Jacques C., j’étais resté en France … !

    Voyage sympa, en effet. Mais de là à goûter un jour à ce schiedam, non, merci ! Déjà que j’ai du mal avec le gin …

    PS : les images que vous souhaitez afficher dans vos commentaires ne le sont pas toujours (c’était le cas ici pour la carte des quatre rivières Schie comme ça l’était déjà pour le sillon de Sylvius dans un commentaire précédent).
    La raison en est que le lien (que vous copiez sans doute dans la barre-adresse de votre ordi) ne fonctionne pas en le collant ici.
    La marche à suivre est la suivante : une fois l’image affichée sur votre écran, faites un clic droit sur celle-ci et sélectionnez « copier le lien de l’image » dans le menu déroulant.
    Il ne vous reste plus qu’à coller ce lien (d’un autre clic droit et sélection de « coller ») dans votre commentaire pour que le miracle s’opère.

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  17. ►Leveto

    Merci pour la technique d’introduction -sans coup férir ? – d’une illustration dont il est permis de penser qu’elle fera très joli dans le décor.
    Maintenant, pris d’une audace peu commune, je m’y risque… avec la carte d’une partie des Pays-Bas tels qu’ils existaient avant le Plan Delta :

    Vous rechignez à la consommation de genièvre ? Fort bien et je n’ai aucune ambition de vous convertir.
    Pour ma part, et c’est « un romantique » qui vous cause, j’ai toujours été sensible à la parophonie qui existe entre Guenièvre et genièvre… et, comme j’ai été très affecté par la récente disparition de Crosby :

    A part ça et si vous avez un moment, lancez-vous dans une opération sanitaire :
    Par pur masochisme, je me suis relu ce matin… et ça, ça fait mal !
    -Comment ai-je pu me planter ainsi dans la citation de Baudelaire ?!… Lamentable !… Synapses en dysfonctionnement au tréfonds de la scissure de Sylvius?

    … tes traîtres yeux priant à travers leurs larmes…

    Ce « priant » est donc à virer pour que « brillant » reprenne la place qui lui est due, faisant ainsi écho à « brouillés« … -Question de sens et de sonorité !

    – Autre détail, j’ai raté un « strike » entre « rides » et « wrinkles »… dans le message qui précédait.
    Bien qu’aucune main courante n’ait été déposée à ce jour, mieux vaut parer à la fâcheuse réprobation, n’est-ce pas ?

    En restant votre obligé.

    P.S Votre devinette, après examen, ne me dit rien. Peut-être vais-je attendre qu’elle soit en solde.

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